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Vladimir Poutine: autoritariste de l’Ancien Monde ou stratège hors pair?4 minutes de lecture

par Diego Taboada
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Les lundis de l’actualité – Diego Taboada

Accusé par la plupart des pays occidentaux d’importants bouleversements géopolitiques contemporains (Ukraine, Syrie), le président russe a rendu à la Russie le statut de puissance mondiale. Retour sur la stratégie et les événements clés qui ont mené à la situation actuelle.

Tout commence à la chute de l’Union soviétique. C’est «la fin de l’histoire», l’avènement d’un nouvel ordre mondial incarné par les Etats-Unis et leurs alliés. Le modèle libéral occidental s’impose. L’opposition bipolaire cède sa place à un idéal de promotion de la paix et de la démocratie, et d’une interdépendance économique entre les Etats. Ce projet se caractérise par l’expansion de l’OTAN et de l’Union européenne vers l’est, et la cooptation de pays comme la Hongrie, la Pologne ou les pays baltes, historiquement proches de l’URSS.

Légitime défense ou expansionnisme assumé?

Pour Poutine, la logique de Guerre froide reste d’actualité, rien n’a changé. Il ne croit pas dans la coopération des pays que suppose la théorie libérale dominante. Le monde reste divisé en deux blocs qui s’affrontent, chacun cherchant à dominer l’autre. Cette expansion continue est perçue comme une menace et une agression. La diffusion des idéaux occidentaux dans les pays proches de la Russie, une manœuvre pour empiéter sur sa zone d’influence.

Le désir de l’Ouest d’intégrer la Géorgie et l’Ukraine est une énième provocation pour le leader russe. Il est convaincu que ce n’est qu’un prétexte afin de «s’emparer» de pays stratégiquement essentiels pour la Russie – notamment pour l’accès à la mer noire. C’est une menace inacceptable. Ses troupes entrent en Géorgie en 2008. C’est le premier avertissement.

La destitution du président ukrainien pro-russe Viktor Ianoukovitch en 2014 est à nouveau considérée comme une attaque contre la Russie et son influence chez ses voisins. Pour Poutine, les occidentaux soutiennent le coup d’état. S’ensuit alors l’invasion de la Crimée et de l’est de l’Ukraine. A nouveau, il s’agit de défendre son territoire, mis en danger par l’action des Etats-Unis et leurs alliés.

Dans cette optique «réaliste», ce sont les occidentaux qui ont provoqué la Russie en voulant attirer les pays d’Europe de l’est dans leur orbite. Les actions militaires russes ne résulteraient alors que de la légitime défense? Difficile d’y croire pourtant. Les actions militaires russes directes, symbolisées par l’intervention en Crimée, sont un moyen pour Poutine de faire oublier l’humiliation qu’a représentée la chute de l’URSS. L’homme a de l’ambition pour son pays. Si Grande Russie renaît de ses cendres, il s’agit de lui rendre sa gloire et son influence d’antan à travers la récupération des territoires «perdus». Outre un mécanisme de défense, les interventions militaires sont probablement aussi le fruit d’un projet plus vaste du président russe pour faire de la Russie un acteur qui compte sur la scène internationale.

La guerre en Syrie, un changement de paradigme

Mais si le monde continue d’être un fragile équilibre entre deux puissances, une intervention trop brutale dans les pays voisins ne risquerait-elle pas de faire réagir ses adversaires? Pourquoi Poutine n’hésite plus à mener des opérations militaires «ostentatoires» comme en Ukraine en 2014 ou lors des bombardements en Syrie pour soutenir le régime en place, faisant fi des avertissements occidentaux?

A lire aussi: La Russie est-elle redevenue une puissance mondiale?

Le changement a lieu pendant la guerre en Syrie. En 2013, le dictateur syrien Assad est accusé d’avoir utilisé des armes chimiques lors des répressions des manifestations. La fameuse ligne rouge d’Obama est franchie. Les Etats-Unis qui affirmaient intervenir font finalement machine arrière et acceptent la proposition de la Russie d’envoyer des équipes de l’ONU pour démanteler l’arsenal chimique. Pour certains, une preuve de maturité, une décision sage afin d’éviter à tout prix les fiascos afghans et irakiens. Mais Poutine, lui, considère cela comme un aveu de faiblesse. Les américains sont devenus frileux et timorés. Le statut de superpuissance et de «gendarme du monde» est révolu. Si Poutine hésitait sur les modalités de l’intervention en Ukraine, il n’y a plus de doute, il peut y aller, la voie est libre. Les américains n’interviendront plus.

La stratégie de ces dernières années a porté ses fruits. La Russie est redevenue une puissance géopolitique incontournable. Il ne semble y avoir plus aucun obstacle à l’hégémonie russe, pays qui n’hésite désormais plus à ingérer directement dans les affaires internes américaines et européennes. L’administration Trump, empêtrée dans des scandales de collaboration avec des agents russes dans la manipulation des dernières élections américaines, semble conciliante et défend un rapprochement avec la Russie. Les européens, eux, sont plus occupés à régler leurs problèmes internes et, trop faibles, peinent à faire front commun. Poutine ne peut que se féliciter de l’aboutissement d’un projet développé pas à pas en exploitant les événements et les faiblesses de ses adversaires. La Russie est de retour, et elle est bien partie pour rester.

Ecrire à l’auteur: diego.taboada@leregardlibre.com

Crédit photo: © President of Russia

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