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«Croisées»: entre matière et mémoire3 minutes de lecture

par Thierry Fivaz
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Les mercredis du cinéma – Thierry Fivaz

Au soir du lundi 8 octobre, il régnait au cinéma Apollo de Neuchâtel une véritable effervescence. Pour la seconde fois de son histoire, l’association Pierrot Productions avait convié ses sponsors, partenaires et amis à venir découvrir en avant-première son nouveau court-métrage intitulé Croisées.

Soufflant déjà sa deuxième bougie, l’association d’étudiants Pierrot Productions – fondée par Kylian Henchoz et Cyrill Burri – a pour ambition de faire connaître aux étudiants de l’Université de Neuchâtel le domaine de l’audiovisuel. Pour ce faire, les membres de l’association ont pour coutume de se donner rendez-vous la première semaine de juillet afin de réaliser un court-métrage. Une magnifique opportunité qui permet, le temps d’un été, de transformer une étudiante en langue et littérature française en camerawoman avertie, ou un futur anthropologue en producteur-logisticien accompli. Un défi d’envergure qui exige une longue préparation en amont.

Ce défi, l’association l’avait déjà relevé en 2017 pour la réalisation de son premier «court». Intitulé Sucre d’Ogre (présenté dernièrement au Festival romand du court-métrage à Yverdon-les-Bains), ce court-métrage narrait l’histoire d’un petit garçon confronté aux difficultés économiques et conjugales de ses parents et qui, pour échapper à la triste situation, s’évadait à travers le jeu. Une première production qui avait fait le choix audacieux de s’inscrire dans le genre fantastique.

Si ce premier court-métrage ne manquait pas de qualités, autant dire que pour leur second, Pierrot Productions a mis les petits plats dans les grands. Sur la forme, la progression – que ce soit au niveau de l’image ou du son – est particulièrement édifiante, voire exponentielle. Pour atteindre ce résultat, l’équipe technique a su jouer de créativité et d’inventivité: un travelling arrière, pris depuis le coffre d’une voiture avec un drone entre les jambes ou des souffleurs à feuille utilisés pour projeter des centaines de feuilles de papier à travers l’embrasure d’une fenêtre. Mais hormis ce saut qualitatif impressionnant pour des passionnés non professionnels, c’est par son scénario que Croisées parvient à se distinguer.

Sortant tout droit de l’imaginaire de Margaux Farron (étudiante en lettres et sciences humaines), Croisées nous raconte l’histoire de Méline, une vieille dame qui vit seule dans sa grande maison et qui, pour contrer l’ennui, collectionne – depuis plus de dix ans – les grilles de ses mots croisés. Mais un jour, alors qu’elle complète la grille portant le numéro 1952, la vieille dame se voit entraînée dans une curieuse conversation qui la fera alors déambuler dans ses souvenirs. Poétique, initiatique, ponctué de flash-back tendres et innocents – comme des moments passés avec son bien-aimé Martin –, la vieille dame semble comme remonter le temps perdu, un temps ou la vieillesse n’était pas.

Le court-métrage, ça se sait, n’est pas un format facile à appréhender. Beaucoup de réalisateurs – même prestigieux – ne sont parvenus à dompter réellement ce format – un format sur lequel, souvent, on se rabat faute de moyens. Il arrive ainsi que les courts-métrages soient décousus, sans queue ni tête, ou réductibles à des scènes de long-métrage; ne possédant dès lors nulle conclusion, voire aucun sens. Fait plus rare et plus heureux, il arrive en quelques occasions qu’un court-métrage nous charme par sa narration, son image ou son univers.

En cela, sans doute que le choix de la jeune réalisatrice Margaux Farron de «limiter l’usage de la parole» participe à la réussite de ce court-métrage qui parvient avec délicatesse et subtilité à communiquer le quotidien d’une vieille dame. Un quotidien qui se vit au rythme de la Traviata de Verdi, et des mots (croisés). Ceux-là mêmes que l’on entend si rarement, mais qui, pourtant, emplissent de leur présence cette existence dont la vie est, sans doute, déjà derrière.

La première projection publique de Croisées aura lieu le vendredi 12 octobre à 18h30 à l’Aula des Jeunes-Rives à Neuchâtel.

Pour plus d’information sur l’association, voir: Pierrot Productions

Ecrire à l’auteur: thierry.fivaz@leregardlibre.com

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