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Les vices de Dick Cheney en gros plan4 minutes de lecture

par Lauriane Pipoz
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Les mercredis du cinéma – Lauriane Pipoz

Dick Cheney est un homme de l’ombre: par une suite de stratagèmes, cet homme du fin fond du Wyoming parvient à se hisser silencieusement à la place de vice-président en 2001. Tirant les ficelles derrière un George W. Bush complètement à côté de la plaque, il veut à tout prix envahir l’Irak. Les attentats du 11 septembre lui en offriront l’opportunité.  

C’est ce visage de l’homme politique Dick Cheney que nous donne à voir Adam McKay. Avec un parti pris de gauche assumé, ce réalisateur nous offre une biographie à charge contre l’ancien vice-président américain. Pendant ces 132 minutes, il est pratiquement impossible de s’ennuyer. Haut en couleurs, son portrait est dressé à base d’ironie féroce, d’humour noir, de métaphores percutantes et d’une bonne dose de surprise. Et à l’aide d’un Christian Bale brillant, incroyablement à l’aise dans son rôle de type-ordinaire-abritant-un-monstre et s’adaptant merveilleusement bien à l’évolution de l’image de son personnage.

Des faits soigneusement sélectionnés

Pour raconter son histoire et la donner à comprendre à un public étendu, McKay a su choisir un certain nombre de faits qu’il a simplifiés et agencés de manière parlante. Evitant alors de tomber dans le piège de la recension de trop nombreux éléments se succédant à une vitesse folle. Les plans sont précis, les dialogues travaillés, sa vision soigneusement élaborée. Il utilise ainsi des ralentis et des zooms pour s’attarder sur certains détails. Quant aux interactions entre les personnages, elles sont longues, intéressantes et parfois même carrément drôles malgré le sujet grave du film.

Notons que les personnages sont plutôt stéréotypés, à l’image d’un Donald Rumsfeld (Steve Carell) cynique et hystérique, d’un George Bush (Sam Rockwell) immature et manipulable ou d’une Lynne Cheney (Amy Adams) égoïste et assoiffée de pouvoir. Cette simplification n’est pourtant pas dérangeante: le film ne prétend pas au réalisme, mais vise à présenter un récit avec un point de vue. Contribuant à faire passer cet avis à l’écran, les morceaux de vie de Cheney – pas toujours agencés chronologiquement, mais avec des répétitions et des analepses – contrastent avec des images relevant complètement d’un autre registre. Comme par exemple celles d’un cœur, ou de lions qui se chassent.

Choc sur choc

Ce cocktail déconcertant a plusieurs fonctions: il met en évidence des aspects de l’histoire comme la monstruosité de Cheney, il donne l’impression que l’histoire s’accélère et tient complètement le spectateur en haleine, puisque les effets de surprise sont toujours au rendez-vous. L’un des plus grands est certainement un faux générique de fin hilarant du type La Petite Maison dans la prairie, jurant avec le ton du film placé à mi-parcours. Relevons également l’originalité d’avoir choisi un narrateur plus ou moins extérieur à l’histoire – nous n’en dirons pas plus, puisque vous irez voir ce film incroyablement bon.

Notons quand même que certaines des images insérées se veulent extrêmement choquantes. Par exemple, des explosions de bombes ou des arrêts sur image montrant des scènes de torture ou de mauvais traitement. Si la place de celles-ci est totalement justifiée par le sujet du film, celles-là paraissent nettement plus dispensables: l’histoire étant déjà très lourde, il n’était probablement pas nécessaire d’en rajouter plus pour choquer.

L’histoire de Dick Cheney, mais pas que

Comme évoqué plus haut, l’épouse de Dick Cheney est dépeinte comme une personne dévorée d’ambition. Le récit biographique le relève à maintes reprises: dans l’ombre de l’homme, il y a la femme. Lynne Cheney tient un rôle prépondérant dans la construction de ce vice-président impitoyable. C’est effectivement elle qui semble avoir hissé cet homme vers le pouvoir en le poussant à devenir quelqu’un d’important alors qu’il pensait plus à se battre qu’à travailler, ou en n’hésitant pas à le remplacer lors de discours quand il avait des problèmes cardiaques.

Son personnage est particulièrement horrifiant, notamment lors de la scène où leur fille leur révèle son homosexualité: ne perdant jamais contenance, Lynne relève immédiatement que ce fait risquera de leur coûter la présidence. Quant à Dick Cheney, son amour pour sa fille semble être l’unique point qui le différencie encore d’un monstre. Ou, comme le formule le personnage de Donald Rumsfeld, d’un «enfoiré impitoyable», car c’est forcément cette image-là du vice-président que vous laissera ce film extrêmement réussi tant par la forme que par le fond.

Ecrire à l’auteur: lauriane.pipoz@leregardlibre.com

Crédit photo: © Ascot Elite Entertainment

Vice
Etats-Unis, 2019
Réalisation: Adam McKay
Scénario: Adam McKay
Image: Greig Fraser
Production: Brad Pitt, Dede Gardner et al.
Distribution: Christian Bale, Amy Adams, Steve Carell
Durée: 2h12
Sortie: 13 février 2019

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