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«Le grand bain» des belles blessures3 minutes de lecture

par Alexandre Wälti
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Les mercredis du cinéma – Alexandre Wälti

Sept types paumés et une femme brisée se reconstruisent grâce au rêve commun de participer aux mondiaux de natation synchronisée. Y parviendront-ils malgré leur mal de vivre? Ce condensé du synopsis annonce l’originalité du film de Gilles Lellouche. Le Grand Bain est une comédie dans laquelle la relation au corps joue un rôle important tout comme les blessures psychologiques. Elles donnent plus de force à l’humour. Nous aurions envie de parler d’ode à la difformité physique, d’éloge de la différence, d’apologie du singulier. Sans avoir peur de ces grands mots puisqu’ils soulignent précisément les particularités du film.

Le corps dans toute sa splendeur! La phrase, ainsi écrite, évoque sans doute dans votre tête une image de musculature féminine ou masculine qui a été parfaitement forgée par l’effort physique. Si, en plus, l’on parle de natation synchronisée, alors les pectoraux et autres abdominaux apparents s’imposent probablement comme une évidence. Pourquoi? Parce que l’image de cet idéal ne date pas d’hier. Déjà les Grecs l’avaient construite et la publicité renforce encore aujourd’hui l’idée d’un corps parfait et d’un esprit combatif.

Sauf que Bertrand (Mathieu Amalric, éblouissant comme d’habitude), Laurent (Guillaume Canet), Marcus (Benoît Poelvoorde), Thierry (Phillipe Katerine), Delphine (Virginie Efira) et les autres sont tous autant «ratés» que touchants. Cette bande de cabossés de la vie se retrouve sans vraiment savoir pourquoi dans la première équipe masculine et française de natation synchronisée. C’est toute la force de la comédie de Lellouche! Prendre le moins sexy pour le rendre extrêmement beau et même très drôle. Mettre un groupe d’hommes dans un milieu a priori féminin.

Le corps est pluriel

Les poils et la bedaine sont mis en avant plutôt que d’être dissimulés derrière la magie du cinéma et la perfection que le septième art véhicule souvent. Une volonté du réalisateur de simplement montrer ce que sont physiquement la ribambelle plutôt impressionnante des acteurs du film. Ce choix esthétique souligne une question essentielle: quelle importance a le corps dans une aventure commune qui finalement nous élève tous?

L’identification avec les personnages est simplifiée dans la mesure que ces derniers reflètent plus honnêtement la réalité. Les corps ne sont pas tous parfaits et les esprits ont parfois beaucoup souffert. Nous avons tous été blessés, à différents degrés. C’est ce qui fait justement notre beauté intime. Nous avons tous, à l’image de Thierry, parfois l’impression de ne pas être écouté. Certains, comme Bertrand, souffrent peut-être de dépression. D’autres, comme Marcus, ont échoué à construire une entreprise à plusieurs reprises et sont endettés jusqu’au cou. Ceux qui, comme Delphine, sont devenus alcooliques sans s’en rendre compte. Nous avons tous nos failles. Pourquoi ne pas en faire nos forces les plus vivaces?

Une comédie troublante

Tous les personnages de Lellouche forment dès lors une matière première idéale pour une comédie. Ils permettent effectivement au réalisateur français de rire des difformités sans oublier les blessures qu’elles peuvent cacher. Il filme par ailleurs les scènes de confessions dans le vestiaire avec une véritable bienveillance et très pudiquement. Il invite finalement tout le monde à mieux assumer tout ce que nous sommes en partageant nos blessures et en les montrant sans gêne.

Une scène condense cette impression générale: Laurent pousse dans la piscine la chaise roulante du coach Amanda (Leïla Bekhti), autoritaire et violente, tout le contraire de Delphine, en oubliant qu’elle ne sait plus nager. Toute l’équipe se précipite alors à sa rescousse. C’est triste, beau, drôle et touchant. C’est un peu comme les dernières paroles du Mal de vivre de Barbara:

Et sans prévenir, ça arrive
Ça vient de loin
Ça c’est promené de rive en rive
Le rire en coin
Et puis un matin, au réveil
C’est presque rien
Mais c’est là, ça vous émerveille
Au creux des reins

Ecrire à l’auteur: alexandre.waelti@leregardlibre.com

Crédit photo: © Frenetic Films

 

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