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Poelvoorde dans un «Au poste!» totalement absurde et génial3 minutes de lecture

par Jonas Follonier
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Au poste!, la nouvelle comédie de Quentin Dupieux, est un huis clos dans un poste de police, où le spectateur assiste à un tête-à-tête entre un garde à vue, Fugain (Grégoire Ludig) et un commissaire, Buron (Benoît Poelvoorde). Le premier est innocent, mais il est soumis à l’interrogatoire car il a appelé la police pour signaler la présence d’un cadavre au bas de son immeuble. Or, en tant que première personne à avoir vu le cadavre, il est considéré comme le suspect numéro un. C’est pour ça.

Un comique de l’absurde

La scène d’ouverture annonce l’atmosphère: un orchestre joue à l’extérieur sous la direction d’un homme en slip rouge et à la moustache magnum. Cette scène n’a aucun lien avec la suite, si ce n’est que le chef d’orchestre en question est identique au personnage de Fugain et que la mise en scène de cet orchestre n’aura été que dans l’imaginaire de Buron, qui écoute le morceau en question – très beau, d’ailleurs –  à la radio. Une mise en abîme de la fiction, qui donne la couleur de la suite, dont on ne dira rien.

Si le film est à saluer, c’est tout d’abord pour sa dimension comique peu commune. Il faut être courageux pour proposer un tel humour au public et à la presse, forcément divisés entre amateurs de l’absurde et personnes qui n’entrent pas dans ce genre de comicité. Malgré cette scission, je fais le pari que chacun peut être séduit, qu’il s’agit d’une porte d’entrée potentielle vers le monde de l’absurde pour ceux que le dramaturge Eugène Ionesco n’aura pas réussi à convaincre le siècle dernier.

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Du Ionesco, il y en a partout dans cette œuvre. Dans les dialogues, dans le théâtre présent déjà dans la manière de jouer des acteurs mais plus encore qu’on ne se l’imagine, dans l’ambiance vieillie ou encore dans l’isolement des personnages. Dans ce film, on voit en effet souvent ce que fait l’un à travers la rédaction de l’autre, en témoigne la scène de l’huître qui deviendra sans doute culte. C’est pour ça qu’on peut parler de situation à la Ionesco, puisque celui-ci souhaitait avant tout montrer par son théâtre l’incommunicabilité entre les individus. Nulle interaction, il n’y a que de l’expression solitaire. Grandiose.

Photographie et universalité

Ce film populaire de seulement une heure quatorze se démarque non seulement par sa puissance comique et intellectuelle, mais aussi par sa photographie des plus soignées, au service du contenu. Les personnages sont illuminés – alors que ce ne sont pas des lumières – par un plafond de lumière situé dans la salle, rapprochant ce poste de garde d’un asile de fous. Les couleurs blanchâtres, jaunasses et sépia composent un décor daté, dimension que l’on retrouve même dans l’affiche du film.

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Or cette situation de l’intrigue dans une époque éloignée de quelques décennies – on ne sait pas exactement combien – et dans une atmosphère singulière permet de parler à tout le monde. C’est par le particulier que l’on accède à l’universalité. Toute administration, pas seulement la police de seconde zone, est ridiculisée dans Au poste!, dont le mobilier contient par ailleurs des sièges typiques des bureaux communistes. Quant au personnage principal, il se fond avec le spectateur, totalement dérouté face à l’irréalisme de cette soirée. Son nom en témoigne: Fugain fait penser à Michel Fugain, qui renvoie à Michel, le prénom français par excellence. Le Jean de Ionesco. Toi, moi. Le plouc. L’homme.

Ecrire à l’auteur: jonas.follonier@leregardlibre.com

Crédit photo: © Praesens-Film

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«En liberté!» et le micmac de nos têtes | Le Regard Libre 7 novembre 2018 - 19 07 52 115211

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