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«Seules les bêtes»: un film déséquilibré4 minutes de lecture

par Loris S. Musumeci
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Les mercredis du cinéma – Loris S. Musumeci

Déséquilibre. Tout est déséquilibré. A commencer par les personnages qui, engageant leur vie dans des faits et gestes complètement absurdes, se montrent à l’écran comme des déséquilibrés mentaux. Les parties du film sont elles aussi déséquilibrées. Un déséquilibre est voulu, en tant que moteur de l’histoire, pour laisser avancer la trame entre un village de montagne enneigé et la chaleur des rues d’Abidjan. Dernier déséquilibre: Seules les bêtes témoigne de petits points d’excellence dans sa réalisation, mais aussi de catastrophes.   

Une femme disparaît dans la montagne, la police enquête, mais difficile de trouver des pistes. Le seul indice dont disposent les autorité, c’est la voiture de la femme abandonnée au bord de la route. Pas de corps, pas de sang, et surtout pas de liens. La victime ne résidait que quelques jours par année dans un chalet du village pour se reposer.

C’est l’occasion de découvrir un couple du village, assez malheureux. Monsieur satisfait ses pulsions affectives par des chats avec des jeunes filles sur Internet. Madame, conseillère en assurances à domicile, couche avec une espèce de sauvage qui possède une ferme non loin de chez eux. Mais il faut dire encore que la victime était mariée, bien qu’elle ait entretenu une relation lesbienne avec une autre femme. Je vous le dis tout de suite: ce n’est pas le mari qui, jaloux, a tué son épouse. Ce serait trop facile.

Différents points de vue

La talent du film, c’est qu’il nous trompe à chaque fois. Il nous met sur des pistes assez loufoques, mais en fait logiques, pour écarter ensuite totalement l’hypothèse. En même temps on en découvre toujours plus, en même temps on est toujours plus brouillé. Et il n’y a que très peu de mensonge dans tout cela. Ce sont les changements de point de vue qui provoquent cet effet: certaines scènes sont pareilles, mais filmées et racontées sous l’angle d’un personnage différent. J’avoue que l’idée est originale, plaisante et que le résultat en devient satisfaisant.

Mais Dominik Moll n’a pas tout réussi dans son travail de réalisation; loin de là. A tel point que le film en devient franchement pénible à certains moments, et plutôt médiocre dans son ensemble. Le scénario joue avec l’absurde. C’est bien. Mais c’est surtout très dangereux. On ne filme pas des scènes absurdes sur un plateau en se poilant avec son équipe de tournage et en se disant: «Eh, les gars! Si on faisait parler un mort, ce serait trop marrant, hein!» Nein, nein, nein! Che suis tésolé mais ça nee fa pas!

De un,  quand le cinéma s’engage dans l’absurde, il doit le faire avec modération; et je crois que les Français ont une fâcheuse tendance à en abuser. De deux, l’absurde demande la plus grande subtilité dans son placement. L’absurde, c’est un élément qui révèle le comique, sans limites, dans une situation dramatique. Le tout, porté par des acteurs d’exception. N’est pas Benoît Poelvoorde qui veut.

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La faiblesse crasse des sentiments humains

Le film ne mise toutefois pas que sur l’absurde, et heureusement. L’intrigue y est. L’humour, aussi. Les acteurs y sont, mêmes si aucune prestation ne déchire l’écran. Certaines interprétations frôlent même le niveau amateur dans des scènes d’ébats complètement vulgaires, déplacées et surfaites. Et la photographie? Etrange de constater que si, à aucun moment, elle n’est absolument négligée, elle demeure beaucoup plus soignée et travaillée dans les scènes qui se déroulent à Abidjan. On dirait que le réalisateur a été plus inspiré par la ville africaine que par la montagne. Là encore, un déséquilibre!

Pour ce qui est du sujet principal de Seules les bêtes, il n’est pas tant abordé que cela de manière spécifique. Quoique l’ensemble de l’œuvre, toujours de manière déséquilibrée, montre la misère humaine dans la perte de relation à l’environnement qui nous entoure. La critique de l’amitié virtuelle est très présente, mais encore plus la faiblesse crasse des sentiments quand les humains y sont soumis. En fin de compte, le film ne manque peut-être pas d’intelligence, mais d’équilibre.

Ecrire à l’auteur: loris.musumeci@leregardlibre.com

Crédit photo: © Filmcoopi

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