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Voix d’antan4 minutes de lecture

par Jonas Follonier
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Le Regard Libre N° 62Jonas Follonier

Il y a eu tant à faire pendant ces jours de confinement. Lire les ouvrages dans lesquels nous rêvions d’avoir un jour le temps de plonger, boucler de vieux dossiers qui traînaient, dormir un peu plus, réapprendre à connaître son appartement, écouter tous les albums de Francis Cabrel, chanson par chanson… Mais c’est en traînant sur YouTube que, personnellement, j’eus l’idée de la meilleure occupation qui fût: regarder les débats télévisés de l’entre-deux-tours des présidentielles françaises de 1974, 1981, 1988 et 1995.

Regarder les vieux débats présidentiels français, c’est s’élever. Au sens propre. Redevenir des élèves face à des maîtres, des vrais. D’ailleurs, au premier débat qui opposa Valéry Giscard d’Estaing et François Mitterrand, en 1974, on a vraiment l’impression d’assister à un échange entre un maître, Giscard, et un élève, Mitterrand. Quelle que soit, du reste, notre sensibilité. Le candidat de la continuité s’impose comme celui qui instruit. C’est l’impression qu’il donne et cette impression est fondée.

Car en ces temps si différents des nôtres à bien des égards, on dominait un débat au sens où l’on maîtrisait et les dossiers et les idées et le discours. La communication politique n’était pas encore reine de tout. Ce qui comptait pour un candidat, c’était de pouvoir donner sa vision sur les institutions, sur la politique extérieure, sur la place de sa nation dans le monde. La teneur des discussions de cette époque est juste incomparable avec les tours de table actuels où l’on se positionne pour ou contre la mondialisation, pour ou contre l’éolien, pour ou contre les immigrés et où l’on emballe le tout avec des formules creuses et convenues.

Aussi, le débat n’était pas un combat, mais bel et bien un débat. C’est-à-dire une discussion, où l’on ne s’interrompait pas, ou si peu, où l’on prenait au sérieux son adversaire, où l’on disait même son estime pour lui. Giscard et Mitterrand cultivaient un grand respect l’un pour l’autre, si ce n’est de l’admiration. C’est manifeste et ça l’est encore plus avec Chirac et Jospin en 1995. Ça l’est un peu moins avec Mitterrand et Chirac en 1988, c’est vrai. Mais subsiste cette hauteur d’esprit et cette connaissance des dossiers et du pays.

Plus frappant encore pour un spectateur d’aujourd’hui: la langue! Ces hommes d’Etat maîtrisaient non seulement la langue, mais aussi sa prononciation. Mitterrand est, de son point de vue, le plus illustre de tous. D’ailleurs, pas étonnant qu’il ait placé la littérature au-dessus de tout, même de la politique, puisque la langue – on ne le dira jamais assez – passe par la littérature et vice-versa. Mais cela montre aussi qu’à trop être à son service, on peut laisser un bilan politique qui, lui, est lourd. La France ne s’est jamais vraiment remise des années de pouvoir socialiste.

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D’aucuns compareront la communication politique d’aujourd’hui aux fameuses formules d’alors; il n’en est rien. Le «Vous n’avez pas le monopole du cœur» d’un Giscard, le «Permettez-moi de vous dire que ce soir, je ne suis pas le Premier ministre, et vous n’êtes pas le président de la République, nous sommes deux candidats à égalité» d’un Chirac sont entrés dans la tradition politique francophone. Ces sorties sont plus que des punchlines: présentes dans notre imaginaire, elles résument en quelques mots des affrontements historiques, des familles politiques et enfin, tout simplement, des vérités utiles.

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Ecrire à l’auteur: jonas.follonier@leregardlibre.com

Image: Ina.fr

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