En salles depuis deux mois, Dune 2 s’impose déjà comme le film le plus populaire de 2024. Avec une note de 8,6/10 sur le site IMDb, la critique le classe parmi les vingt meilleurs longs métrages de tous les temps. Les mythes religieux se portent à merveille.
L’histoire de Paul Atréides – le héros de Dune incarné par Timothée Chalamet – résonne davantage avec celles de Moïse, Jésus-Christ et Mahomet qu’avec les héros de Blade Runner ou Interstellar. Le succès de Dune tient-il donc à la même formule que celle de millénaires textes sacrés? De nombreuses similitudes portent à le croire. A l’instar de Moïse, Paul Atréides grandit dans la noblesse avant de se dresser en sauveur d’un peuple opprimé. Tout comme Jésus, il lutte, armé de pouvoirs surnaturels, contre les forces maléfiques et tentatrices qui jalonnent son parcours initiatique. A la manière de Mahomet, il unifie différentes communautés sous un même crédo, devenant un chef religieux et politique.
La foi, entre superstition et résilience
Le caractère religieux de Dune dépasse le personnage de Paul. La foi inébranlable des Fremen, le peuple indigène de la planète où se déroule l’histoire, ne cesse de fasciner le public. Cette fascination réside dans un paradoxe: d’une part, leur superstition peut susciter rires et moqueries; d’autre part, leur croyance en quelque chose de supérieur et d’éternel, ainsi que la force et la résilience que cette croyance transcendante leur confère, inspirent un profond respect.
La notion de transcendance se manifeste par ailleurs dans la relation qu’entretiennent les Fremen avec la nature. L’eau, du fait de sa rareté, devient l’objet de rites et coutumes. Les vers des sables, ces créatures à la fois majestueuses et terrifiantes, donnent lieu à une adoration qui rappelle d’anciens cultes païens. Enfin, en faisant de la planète Arrakis une métaphore des préoccupations contemporaines liées à l’environnement, Frank Herbert – l’auteur du roman à l’origine du film – se révèle un précurseur du mouvement écologiste.
La modernité en quête de sacré
La bonté apparente des Fremen contraste avec la cruauté des colonisateurs d’Arrakis, les Harkonnen, une famille noble issue d’une civilisation technologiquement avancée, matérialiste, décadente et obsédée par le pouvoir. Mais surtout: les Harkonnen se dispensent de toute pratique religieuse, à laquelle ils substituent la consommation et le divertissement. De quoi rappeler les grands péchés que les détracteurs de la modernité lui reprochent.
Le triomphe de Dune révèle-t-il notre soif de sacré dans une époque spirituellement aride? Une chose est certaine: le réalisateur Denis Villeneuve a confirmé que le troisième opus se basera sur le second tome de Frank Herbert, intitulé «Le Messie de Dune». On ne peut plus clair. Dans le même temps, l’intérêt marqué pour des productions à thème religieux sur les plateformes de streaming semble corroborer cette idée. Par exemple, Testament: l’histoire de Moïse est devenue la deuxième série la plus regardée sur Netflix en Suisse. The Chosen, qui raconte la vie de Jésus de Nazareth et dont la troisième saison est projetée dans les cinémas romands, a captivé plus de 500 millions de spectateurs à travers le monde.
Ces phénomènes culturels semblent témoigner d’un désir collectif de renouer avec le sacré, ou du moins, d’explorer des récits qui nous relient à une dimension spirituelle souvent négligée dans le discours public contemporain.
Ecrire à l’auteur: yann.costa@leregardlibre.com
Vous venez de lire une critique en libre accès, tirée de notre dossier SACRÉ publié dans notre édition papier (Le Regard Libre N°106). Débats, analyses, actualités culturelles: abonnez-vous à notre média de réflexion pour nous soutenir et avoir accès à tous nos contenus!
Denis Villeneuve
Dune: Deuxième Partie
Avec Timothée Chalamat, Zendaya, Rebecca Fergusson
Février 2024
166 minutes