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«Vous allez vivre dans un futur vertigineux»4 minutes de lecture

par Nicolas Jutzet
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Le Regard Libre N° 15 – Nicolas Jutzet

On doit le titre de cet article à Laurent Alexandre, énarque et chirurgien de formation, devenu chef d’entreprise à succès. Il est, avec bien d’autres, convaincu que notre génération va devoir affronter et répondre à des interrogations d’une complexité et d’une importance jamais vue. C’est dans une chronique saisissante, « Lettre à mes enfants », qu’il nous appelle à ouvrir les yeux sur ce futur. Car oui, nous allons devoir redéfinir notre civilisation, dont beaucoup de repères vont se diluer dans ce qui sera la quatrième révolution industrielle : la fusion des technologies.

Celle-ci mêlera les nanotechnologies (l’infiniment petit), les biotechnologies (la fabrication du vivant), l’informatique (l’intelligence artificielle) et les sciences cognitives (l’étude du cerveau humain), soit les NBIC. Concrètement, il nous faudra notamment légiférer et guider la mouvance disparate du transhumanisme, qui lutte pour la cause honorable d’améliorer les caractéristiques physiques et mentales de l’être humain. Soit la possibilité de voir l’humanité triompher de la mort, mettant un terme à la fatalité qui voit l’homme comme un simple mortel voué au déclin. C’est la fin de la maladie, du vieillissement ou encore du handicap que l’on entrevoit. L’Homme prend le pas sur la nature, sur le destin, il est seul maître à bord.

Vous comprendrez facilement que cette perspective mérite et exige une réflexion et une préparation faramineuses. Il en va de la suite de notre aventure. Nous avons une responsabilité historique. Pourfendeur ou défenseur de ce futur, il nous faudra décider, non pas pour nous, mais pour notre espèce entière. Où mettre les limites, les garde-fous et à quelles conditions ? Changer sans oublier le passé, une tâche titanesque. Soyons à la hauteur, nous la relève, car nos élus, en partie technophobes, ne semblent pas s’apercevoir du tsunami qui est en train d’arriver. Déjà en 1992, Max More écrivait les lignes suivantes :

« Mère Nature, nous te sommes vraiment très reconnaissants de ce que tu as fait pour nous. Tu y as sans aucun doute consacré le meilleur de tes forces. Mais, sans vouloir te manquer de respect, concernant la constitution de l’homme, tu n’as pas toujours bien travaillé. Tu nous as faits vulnérables aux maladies et aux blessures. Tu nous obliges à vieillir et à mourir, au moment où nous atteignons peu à peu précisément la sagesse. Et tu as oublié de nous fournir le mode d’emploi explicitant comment nous fonctionnons !… Ce que tu as créé est magnifique, certes, mais pourtant profondément déficient… Nous avons décidé qu’il était temps d’améliorer la constitution de l’homme… Nous ne le faisons pas de gaîté de coeur, sans crainte ni respect, mais nous le faisons prudemment, intelligemment, avec le dessein de nous améliorer… Dans les décennies qui viennent, nous chercherons à faire une série de modifications de notre constitution… Nous ne tolèrerons pas plus longtemps la tyrannie de l’âge et de la mort… Nous élargirons le champ de nos perceptions… Nous améliorerons notre organisation et nos facultés nerveuses… Nous remodèlerons notre structure motivationnelle, comme notre réceptivité émotionnelle… Nous nous programmerons nous-mêmes génétiquement et gagnerons la maîtrise de nos processus biologiques et neurologiques. »

J’aime l’idée que nous ayons rendez-vous avec l’histoire, comme j’aurais aimé être là au moment de la première révolution industrielle. Voir un monde mourir, disparaître et laisser sa place à un nouveau né. C’est exigeant, tellement palpitant et contrairement à la première révolution, nous pouvons cette fois, ensemble, choisir notre destinée. Toutefois, soyons lucides, ces changements se passent toujours dans la douleur, c’est le prix à payer de la destruction créatrice. Il est illusoire de croire que la quatrième révolution industrielle se fera en douceur, elle sera violente, déstabilisatrice. La destruction créatrice est à l’œuvre.

Loin de s’arrêter à l’optimisation de l’être humain, celle-ci rendra par exemple obsolète une quantité de postes de travail automatisables, pour en créer d’autres, plus qualifiés et de facto moins accessibles. De manière générale, elle verra s’affronter plusieurs visions du monde, entre ceux (les « bioconservateurs ») qui se contentent de l’état actuel de l’humain et de son entourage avec ses forces et ses faiblesses, et les autres qui, à des degrés divers, épouseront cette évolution. Cette diversité d’opinion est salutaire, elle nous forcera à nous remettre sans cesse en question.

Pour ma part, l’espoir d’une vie qui dure plusieurs siècles est réel. Si Laurent Alexandre, qui pense que l’humain vivra mille ans dans un avenir relativement proche, a raison, imaginez la perspective qui se présenterait à nous. Finalement, qui n’a pas de projet, une pile de livres à lire, une activité en tête pour chaque petit grain qui s’écoule dans le grand sablier qu’est notre espérance de vie ?

Le dernier grain me laissera le temps de vérifier si notre génération a su prendre son rôle au sérieux… ou si par sa faute, l’humanité a échoué, que ce soit par prudence ou par démesure. N’est pas démiurge qui veut.

Ecrire à l’auteur : nicolas.jutzet@leregardlibre.com

Crédit photo : © 01Net

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