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Economie

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L’argent liquide ne doit pas disparaître6 minutes de lecture

par Nicolas Jutzet
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La Banque centrale européenne cessera d’imprimer le billet de 500 euros à partir de 2018. Photo: Alexa via Pixabay

Le nouveau billet de 50 francs inaugure la neuvième série mise en circulation par la BNS. L’occasion de rappeler l’importance de l’argent physique à l’heure du tout numérique, où certains accusent notamment le cash de favoriser le financement d’activités illégales.

Les transactions en espèces ont mauvaise presse. Le phénomène est ancien, mais il semble s’être considérablement accéléré avec les récents attentats en France. Croyant bien faire, la politique s’est emparée de la problématique. Cette croisade contre le cash connaît ses premières victimes: la Banque centrale européenne cessera d’imprimer le billet de 500 euros à partir de 2018. En France, on retiendra l’interdiction de tout paiement en argent liquide de plus de 1’000 euros, ou l’obligation pour les établissements bancaires de signaler toute personne qui effectue des dépôts ou retraits d’espèces supérieurs à 10’000 euros par mois.

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Beaucoup plus avancée, la Suède est en passe de devenir «cashless». Au pays des espèces en voie de disparition, seul 20% des achats dans le commerce se règlent encore en argent comptant. Le montant de couronnes (la devise suédoise) en circulation avoisine à peine les 9 milliards de francs suisses. En comparaison, notre chère Confédération paraît outrageusement conservatrice. Les billets en circulation représentent 67’412’087’130 francs suisses. Et la limite pour les paiements en espèce est fixée à 100’000 francs.

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Dessin: Elias Jutzet

Un rempart contre les mauvaises politiques économiques

L’indépendance monétaire et la liberté relative laissée aux citoyens helvétiques fait grincer des dents en haut lieu. Car en plus d’être une monnaie réputée stable, elle possède l’un des derniers gros billet en libre accès: le billet de 1000 francs. Ce dernier ne pèse pas moins de 47 milliards de francs dans le bilan de la Banque nationale suisse (BNS), bien qu’il ne représente qu’une dizaine de pourcents des billets en circulation. Et contrairement à ce que veulent bien faire croire les pourfendeurs de l’argent liquide, les gros billets sont avant tout appréciés par les épargnants. La BNS l’avoue d’ailleurs à demi-mot sur son site:

Depuis 2008, le numéraire a regagné du terrain en tant qu’instrument de réserve. La demande accrue de billets de banque s’explique notamment par la persistance de taux d’intérêt bas. En outre, la crise des marchés financiers et celle de la dette ont rendu la détention de numéraire encore plus attrayante.

Cet amour du billet arborant la tête du peu connu Jacob Burckhardt cache donc principalement un manque de confiance envers les politiques économiques hasardeuses ayant cours actuellement. Aujourd’hui, à cause de certaines banques centrales fonctionnant avec des taux d’intérêt directeurs au-dessous de zéro, le monde marche sur la tête. Il inverse les rapports traditionnels entre créanciers et débiteurs. Auparavant, celui qui prêtait son argent recevait une rémunération pour le risque encouru. Désormais, c’est le contraire. On doit payer pour prêter (déposer) son argent. Pour l’instant, cette aberration n’est pas encore totalement appliquée aux particuliers en Suisse. Seuls ceux qui possèdent plus de 100’000 francs en dépôt sont touchés.

Des taux négatifs à la chasse au cash

Le but de la politique de destruction de l’épargne est de forcer les gens à dépenser, afin de relancer la croissance et ainsi générer de l’inflation. Petit problème, la population manque de confiance en l’avenir, et de ce fait thésaurise. Ce qui rend les politiques de relance inefficaces. Par conséquent, on applique un taux négatif pour «sanctionner» cette frilosité. C’est là qu’interviennent nos chers billets de 1000 francs. Ils font office de sortie de secours pour ceux qui refusent de se voir ponctionner leur épargne par les banques, et qui en même temps refusent d’investir. On préfère stocker le tout dans un coffre privé, à l’abri des taux d’intérêts négatifs.

Désespérés par cette indiscipline, les banques centrales et certains politiciens ont déclaré la guerre à l’argent liquide. Seul coupable à leurs yeux de l’inefficience de leur politique abracadabrantesque. Une fois l’argent physique supprimé, le citoyen sera bien plus facilement manipulable. C’est une évidence: qui déciderait de laisser son argent sur son compte au lieu de le dépenser si, jour après jour, il perd de la valeur? Imaginez-vous que ces mêmes apprentis sorciers envisagent de déposer une somme d’argent sur tous les comptes bancaires («helicopter money») pour créer de l’inflation. Comme pour le revenu de base inconditionnel, l’argent semble tomber du ciel.

Une stratégie vouée à l’échec

Derrière cette innocente lubie de la transparence se cache une atteinte gravissime à notre liberté. Au lieu d’une remise en question des politiques économiques en place, nous assistons à une joyeuse destruction du pouvoir de décision de chacun. On nous expliquera qu’il s’agit d’une mesure nécessaire pour arriver à enfin relancer nos économies fatiguées. C’est pourtant faux. Et c’est peut-être le plus triste dans l’histoire: on restreindrait les libertés sans arriver à un misérable résultat positif. Car contrairement à ce que croient ces bureaucrates, la relance passe par la confiance (et donc la demande), et non par l’accès facilité au crédit (politique de l’offre) ou par l’obligation de dépenser son argent.

L’autre argument contre le cash est qu’il favoriserait la circulation d’argent sale, la corruption et le financement d’activités illégales. Alors certes, l’abandon du numéraire permettrait d’éviter certains braquages, cambriolages et autres vols à la tire. Cela ne règlerait cependant pas le problème de la relance de l’économie. Et les malfrats se réorienteraient sur des cas de fraude à la carte de crédit. Rien qu’à ce jour, 5% des titulaires de cartes de crédit ont été victimes d’une fraude.

L’espoir des cryptomonnaies

Toutefois, un espoir existe: les monnaies virtuelles. La plus connue, le Bitcoin, fonctionne grâce à la technique du «blockchain» (chaîne de blocs), un système décentralisé où les utilisateurs valident leurs transactions entre eux. On élimine donc les intermédiaires que nous connaissons dans le monde bancaire. D’autres cryptomonnaies voient le jour, et comme elles échappent à tout pouvoir, elles sont attaquées. Avec les mêmes arguments que l’argent liquide: mettre fin au blanchiment d’argent et aux divers trafics illégaux (drogues, armes). Marine Le Pen s’est même jurée d’en interdire l’utilisation si elle venait à être élue en 2017.

Selon son auteur, le nouveau billet de 50 francs suisses mis en circulation le 12 avril dernier doit nous inviter à l’aventure, son motif principal étant le vent. Le vent qui, comme au contact d’un pissenlit au capitule fleuri, nous arrache avec une douce violence de notre confort habituel. C’est le vent de l’espoir. Celui des lendemains qui chantent. Un chant de liberté!

Ecrire à l’auteur: nicolas.jutzet@leregardlibre.com

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