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Chronique

Le Suicide de l’Amérique, et après?3 minutes de lecture

par Pascal Couchepin
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L’essai de l’expert en géostratégie François Heisbourg est paru à la mi-juin de cette année. Je l’ai lu en septembre. En l’ouvrant, je me suis demandé s’il n’avait pas déjà perdu une partie de son actualité, tant les événements ou incidents se bousculent à un rythme rapide depuis le retour au pouvoir de l’imprévisible Donald Trump. Il n’en est rien. Cette excellente étude est plus que jamais nécessaire pour aider à se forger un jugement mieux assuré sur la politique menée par les Etats-Unis.

En introduction, Heisbourg réfléchit à la notion d’empire, à la naissance et à la fin de ces grandes entités étatiques. La plupart des empires ont disparu à la suite de guerres épuisantes. La Grande Guerre fut fatale à quatre empires, allemand, austro-hongrois, russe et ottoman. Les empires coloniaux français et anglais y ont entamé un déclin qui s’achèvera après la Deuxième Guerre mondiale. En revanche, cette époque fut favorable aux Etats-Unis, qui hésitèrent, au début, à assumer leur rôle. Le président américain Wilson fut à la base de la Société des nations, mais le congrès américain ne le suivit pas et refusa l’adhésion à cette institution genevoise. Ouverture et replis sont des constantes de l’histoire américaine. Les Etats-Unis ont connu au XIXe siècle des périodes d’expansions territoriales à la suite de guerres de conquêtes, Californie et Texas, ou par des achats, Louisiane, Alaska mais aussi des temps de repli sur le continent, la doctrine Monroe, ou sur soi. L’Amérique semblait conduit par la conviction qu’elle a un destin particulier. En 1845, le journaliste américain O’Sullivan parlait, après la conquête du Texas, de destinée manifeste, de manifest destiny. Depuis le début du XXe siècle se constitua ce que Heisbourg nomme «l’empire flamboyant». Les Etats-Unis vécurent une période de croissance démographique due au taux de natalité et à l’immigration. La crise économique des années 1930 menaça la solidité de l’Empire, mais Roosevelt réagit vigoureusement et habilement avec le New Deal .

L’intervention des Etats-Unis durant la Seconde Guerre mondiale fut décisive. Le monde issu de la guerre fut façonné par l’Amérique: création des Nations Unies, institutions de Bretton Woods pour la finance, libéralisation du commerce sous l’égide de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), création de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) mais aussi guerres de Corée, du Vietnam, d’Afghanistan et autres interventions en Amérique latine et ailleurs. Durant cette période, la culture américaine, au sens large, s’imposa. Mais quelques craquements se firent aussi sentir après la guerre d’Irak en particulier. L’Amérique refusa d’adhérer au Tribunal pénal international. Son refus de nommer un juge américain à la Cour de l’OMC paralyse cette institution. L’arrivée au pouvoir de Trump est une étape qualitativement différente des incidents antérieurs. La volonté de refuser les responsabilités inhérentes à la superpuissance américaine devient un programme permanent couplé à l’ambition d’imposer des règles nouvelles qui tiennent souvent du pillage ou du mépris des autres nations. Heisbourg voit dans cette politique un suicide de l’Empire américain. Ses arguments sont solides.

Mais y a-t-il une vie après le suicide? Quelle place a, dans ce nouvel ordre mondial, la Russie à qui les USA font les yeux doux? Et la Chine et Taïwan? L’alliance avec l’Europe a-t-elle épuisé ses charmes sécuritaires?

Heisbourg ne donne pas de réponses définitives à ces questions d’autant plus qu’avec Trump tout est dangereusement ouvert. Son ouvrage est cependant une lecture utile pour ceux qui pensent que, dans un monde aussi dangereux que le nôtre, toutes les pistes doivent être explorées en s’appuyant sur l’histoire et ses leçons.

L’ancien conseiller fédéral Pascal Couchepin partage chaque mois une lecture qui l’a marqué.

Ecrire à l’auteur : pascal.couchepin@leregardlibre.com.

Vous venez de lire un article tiré de notre édition papier (Le Regard Libre N°120).

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