Après avoir sorti il y a quelques mois un sketch de sa série «TOC!» publiée par Le Temps qui a été jugé transphobe par certains groupes, ou plutôt certains individus, la comédienne romande Claude-Inga Barbey a été épinglée la semaine dernière pour un nouvel épisode. Elle a été accusée d’y relayer du racisme anti-Chinois. Le fait de devoir rappeler, face à ces attaques infondées, la différence entre un personnage et la comédienne qui le joue est d’une tristesse affligeante. Mais c’est indispensable.
Claude-Inga Barbey serait raciste. Ou du moins, son dernier sketch, selon Amit Juillard, journaliste au Blick. Et aussi Martine Brunschwig-Graf, présidente de la Commission fédérale contre le racisme (CFR), qui justement s’est exprimée dans le média en ligne: «Je suis consternée. D’habitude, j’aime bien ce que fait Claude-Inga Barbey. Mais là, ce n’est pas drôle, c’est insultant, inutilement blessant et de mauvais goût. Ce sketch véhicule les pires stéréotypes sur les personnes asiatiques ou d’origine asiatique. Ces propos peuvent être considérés comme racistes à l’égard d’une communauté déjà exposée à cause du Covid.»
Le sketch en question:
Il y a déjà dans les propos de Martine Brunschwig-Graf une bonne partie de ce qu’il est important de comprendre dans cette polémique. La présidente de commission exprime son point de vue sur le sketch de Claude-Inga Barbey en commençant par dire que d’habitude, les petits films de la comédienne romande lui plaisent, mais celui-ci non. Cette remarque, qui a tout l’air d’introduire un propos nuancé, devrait au contraire nous alerter: qu’a à voir avec cette histoire le goût subjectif de Mme Brunschwig-Graf sur la qualité du travail de Claude-Inga Barbey? La réponse est simple: rien.
L’urgence d’un retour aux fondamentaux
Car je dois vous avouer quelque chose, et à vous en premier, Madame Barbey: je ne me rue pas sur chacune de vos vidéos. Je regarde peu de sketchs en général, à la fois par manque de temps et par manque d’attirance pour ce genre d’exercices. Et pourtant, je vous soutiens à 100% face à cette nouvelle levée de boucliers. Cela, pour trois raisons qui sont autant d’évidences. Petit a, il faut distinguer le comédien des personnages qu’il incarne. Petit b, on doit pouvoir rire de tout le monde, sans exception. Petit c, ne pas comprendre l’ironie est annonciateur d’une disparition de la civilisation.
En plus, l’ex-chroniqueuse vidéo du Temps (elle a jeté l’éponge devant la pression reçue avec cette nouvelle polémique) a eu l’occasion d’expliquer plusieurs fois sa démarche, comme par exemple lors du débat Infrarouge, surréaliste mais nécessaire, qui lui était consacré, rappelant à quel point elle souhaite justement dénoncer le manque d’ouverture et de réflexion de ses personnages. Mais l’actrice ne devrait même pas avoir à s’expliquer. Que ce passage soit néanmoins obligé pour dissiper les malentendus est l’illustration parfaite de ce qu’il est urgent d’opérer en notre folle époque: un bon vieux retour aux fondamentaux.
N’a-t-on donc rien retenu de Charlie Hebdo? «Etre Charlie», répétons-le mille fois s’il le faut, ce n’est pas bouffer du curé et du Mahomet tous les dimanches midi, mais accepter que certains le fassent, et plus généralement que l’on puisse rire de toutes les opinions et religions, même si on ne goûte pas à cet humour. Contester cet esprit des Lumières, voilà la véritable intolérance. Et voilà où est en train de sombrer une partie de nos sociétés occidentales, qui avaient pourtant réalisé de si belles avancées en la matière en une si courte échelle temporelle. C’est tout à l’honneur du quotidien Le Temps, pour le coup, de défendre ces acquis. Puissions-nous, Romandes et Romands, faire de Claude-Inga Barbey le symbole de notre attachement à la liberté.
Ecrire à l’auteur: jonas.follonier@leregardlibre.com
Image d’en-tête: © DR
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3 commentaires
Cher Monsieur,
Chère Claude-Inga
L’intelligence
L’impertinence
Insupportable pour certains
Dommage
Triste
Nous avons eu beaucoup de plaisir et apprécions l’humour
C’était parfois le lot de consolation en fin de journée, après l’obscurantisme rencontré parfois
Espérons qu’il restera toujours une part de résistance dans le monde
Bon vent
Alain
Nous arrivons dans un monde triste ou seule la vision du “bien” défendue par une minorité hurlante prend racine. Une personne comme Amit Juillard affirme que le monde a changé, sans elle… Moi je lui répondrait que son monde a changé sans la majorité. Seul ceux qui cri le plus fort sont entendu, dommage que la grande majorité qui n est pas systématiquement choqué n’ose pas s’exprimer. Triste monde dans lequel nous nous dirigeons.
Nous irons bientôt vous applaudir à Beausobre !! Ne vous laissez pas atteindre par des esprits étroits…!!!