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Société

Interview

«Sous certaines conditions, l’intelligence prédispose à l’erreur»14 minutes de lecture

par Yann Costa
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L’essayiste français Samuel Fitoussi publie «Pourquoi les intellectuels se trompent», un essai incisif sur les mécanismes qui poussent certains esprits brillants à défendre des idées absurdes, avec des conséquences parfois désastreuses.

A peine âgé de 28 ans, Samuel Fitoussi signe un deuxième ouvrage remarquable, nourri de psychologie cognitive, de sociologie et d’histoire des idées. Avec un ton aussi rigoureux qu’irrévérencieux, il y explore une énigme contemporaine: pourquoi tant d’intellectuels se sont-ils lourdement trompés – en particulier durant le siècle dernier? Et pourquoi continuent-ils, aujourd’hui encore, à diffuser des idées contestables sans jamais payer le prix de leurs erreurs? Le chroniqueur au Figaro s’est entretenu avec Le Regard Libre.

Le Regard Libre: L’auteur du roman dystopique 1984, George Orwell, que vous citez à plusieurs reprises dans votre livre, avançait que «certaines idées sont si absurdes que seuls les intellectuels peuvent y croire». A quoi faisait-il référence?

Samuel Fitoussi: Ce qu’Orwell constatait, à raison, c’est que, sous certaines conditions, l’intelligence prédispose à l’erreur. Il en a d’ailleurs lui-même fait les frais. L’auteur britannique ne trouvait pas d’éditeur pour son roman La Ferme des animaux parce qu’il s’agissait d’une satire anti-stalinienne. L’intelligentsia occidentale, commentait-il, avait développé une «loyauté nationaliste» à l’égard de l’URSS. Même aux Etats-Unis, les grands éditeurs new-yorkais refusaient de publier des récits critiquant la Russie postrévolutionnaire, notamment ceux d’Ayn Rand. Le même aveuglement s’est produit face au nazisme: Heidegger, Carl Schmitt, ainsi que de nombreux universitaires soutenaient activement Hitler. A la conférence de Wannsee, la moitié des participants détenaient un doctorat. Plus tard, les mêmes élites se sont entichées de Mao, comme Simone de Beauvoir, qui a écrit un livre entier à sa gloire. Heureusement que l’intelligentsia n’a pas eu le dernier mot.

Vous expliquez que ces erreurs sont liées à un conflit entre deux types de rationalité: celle épistémique et celle sociale. Comment les définissez-vous?

La rationalité épistémique est celle qui nous pousse à chercher ce qui est vrai. La rationalité sociale, elle, nous fait adopter les idées qui nous font bien voir socialement, c’est-à-dire celles qui sont considérées comme vraies par les autres. Ces deux types de rationalité sont en perpétuelle compétition en chacun de nous.

Vous suggérez que chez les intellectuels, la rationalité sociale prend souvent le dessus. Pourquoi?

D’abord, leurs capacités cognitives les rendent capables de rationaliser n’importe quelle croyance, y compris les plus fausses: là où d’autres se heurteraient à des incohérences, les intellectuels parviennent à construire des raisonnements sophistiqués pour défendre des absurdités. Ensuite, leurs idées constituent le cœur de leur identité professionnelle et sociale – les remettre en question, c’est risquer leur réputation, leur réseau, voire leurs revenus. Et puis, contrairement à d’autres métiers, ils ne subissent généralement pas les conséquences négatives de leurs erreurs.

C’est-à-dire?

Un boulanger sait immédiatement si son pain est raté: il perd ses clients. Un pilote qui accumule les erreurs finit par s’écraser et mourir avec son avion. En revanche, l’intellectuel peut soutenir des absurdités pendant des décennies sans jamais en payer le prix. Cela, pour deux raisons. D’une part, parce que ses prédictions portent souvent sur le long terme et reposent sur des enchaînements de causes et d’effets complexes, il est difficile – voire impossible – de les invalider empiriquement. D’autre part, les critères d’évaluation de ces idées sont profondément subjectifs: même lorsque l’échec du maoïsme était évident (famines, répression, dizaines de millions de morts), des figures comme Simone de Beauvoir continuaient à en faire l’éloge, au nom d’un idéal supérieur censé justifier les sacrifices.

Et j’imagine que plus l’environnement dans lequel on évolue devient sûr – typiquement dans les pays développés dans lesquels évoluent les intellectuels – plus la rationalité sociale a tendance à l’emporter sur la rationalité épistémique.

Exactement. Dans un environnement hostile, la rationalité épistémique est vitale: vos erreurs de jugement peuvent vous coûter cher, parfois même votre vie. Donc, plus une société devient prospère grâce à des idées rigoureuses acquises avec la rationalité épistémique, plus elle se met à privilégier la rationalité sociale… et à saper les bases qui ont précisément permis l’avènement de cette prospérité.

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Ce qui caractérise les intellectuels, ce n’est donc pas leur capacité à aboutir aux meilleures conclusions, mais à rationaliser quelque idée que ce soit, y compris les pires. Pourquoi ces dernières deviennent-elles populaires, alors même qu’elles sont contraires à la rationalité épistémique?

Parce qu’une idée peut être socialement performante sans pour autant être vraie. Par exemple, certaines idées, souvent collectivistes, plaisent aux intellectuels parce qu’elles leur donnent un rôle valorisé: celui d’ingénieurs sociaux, chargés de transformer la société. Elles leur permettent de se concevoir comme les architectes d’une utopie. Dans une vision libérale, où la société est le résultat spontané d’échanges volontaires entre les individus, leur rôle est plus modeste, souvent descriptif, ce qui est moins gratifiant.

N’est-ce donc qu’une question de pouvoir?

Je ne serais pas aussi cynique. C’est humain. Lorsqu’on exerce un métier, on souhaite croire qu’il est utile. La conception selon laquelle le progrès advient par la découverte de la recette de la bonne société donne du sens au travail des intellectuels. Et, par définition, les utopies offrent cette promesse.

Pourtant, il existe aussi des intellectuels libéraux.

Bien sûr. Mais les intellectuels libéraux, comme Raymond Aron, partent avec un désavantage sur le «marché des idées»: les leurs sont moins séduisantes, moins romantiques. Elles reposent sur des arbitrages permanents, des compromis nécessairement insatisfaisants. Elles appellent plutôt à la prudence, à l’humilité. C’est moins sexy qu’une grande promesse révolutionnaire. Pourquoi valait-il mieux avoir tort avec Sartre que raison avec Aron? Réponse d’Aron lui-même: «L’intelligentsia n’est pas prête de me pardonner de ne pas ouvrir la voie de la société bonne et de ne pas tenter d’enseigner la méthode pour y accéder.»

Vous évoquez dans votre livre le concept d’oikophobie – le contraire de la xénophobie – qui expliquerait la fascination de certains intellectuels pour les régimes tyranniques.

Dans les années 1940, Orwell dénonçait déjà «l’anglophobie» de l’intelligentsia britannique. L’intellectuel de gauche, observait-il avec humour, préfère être aperçu en train de voler dans une boîte à dons pour les pauvres qu’en train de chanter l’hymne national la main sur le cœur. Roger Scruton, après lui, parlait en effet de «l’oikophobie» des intellectuels occidentaux, et regrettait que l’histoire britannique soit enseignée à l’école comme une suite de crimes dont il faudrait se repentir. Or c’est le rejet de sa propre culture qui conduit à idéaliser des régimes étrangers, y compris les plus violents.

Cette posture critique à l’égard de sa propre nation est un moyen de gagner en prestige, notamment chez les intellectuels de gauche.

Oui. Steven Pinker propose d’imaginer l’intelligentsia engagée dans une compétition contre d’autres catégories de la population dans une lutte pour le prestige moral. En dénonçant la société qu’ils habitent, les intellectuels décrivent les politiciens comme incompétents, les entrepreneurs, mus par des intérêts égoïstes, les journalistes comme irresponsables, le peuple comme aveugle, victime de fausse conscience, les artistes comme porteurs de messages pernicieux, et les générations passées comme ayant échoué. En dévalorisant les autres, par contraste, les intellectuels se valorisent eux-mêmes.

N’existe-t-il pas le risque inverse à droite, celui de pécher par patriotisme?

Absolument, il y a des réflexes irrationnels à droite aussi – on l’a vu avec une certaine fascination pour Poutine depuis les années 2010. Je me méfie surtout de la tendance à plaquer les mêmes grilles de lecture sur tous les sujets, y compris économiques, qui peut conduire à de graves erreurs. Par exemple, être critique vis-à-vis de l’immigration (hostile à la circulation des personnes) ne doit pas automatiquement signifier être contre le libre-échange (hostile à l’échange des biens). Or aujourd’hui, certains, à l’image des trumpistes, semblent dresser une équivalence logique entre les deux positions. Il faut veiller à raisonner sujet par sujet, sans adhérer à un «paquet» d’idées qui correspondraient à celles d’un camp et que l’on approuverait automatiquement.

Ce qui ressort de votre livre, c’est que les intellectuels se trompent plus souvent que les gens «ordinaires», alors que c’est précisément l’inverse de ce qu’on attend d’eux. Mais est-ce vraiment grave?

Oui, parce que ces personnes ont de l’influence. Prenez l’université: certaines disciplines, notamment dans les sciences sociales, émettent des théories farfelues – par exemple, le fait qu’il existerait d’innombrables identités de genre. En soi, tout le monde peut croire à des choses absurdes. Le problème, c’est que les thèses provenant de l’université en ressortent avec une légitimité «scientifique» qui leur octroie une autorité supérieure. Les délires marginaux ne changent pas le monde, mais les erreurs des élites, si.

A en croire la récente élection de Donald Trump, et le sentiment général anti-élites qui règne, il semblerait que vous surestimiez l’influence des intellectuels.

Celle-ci ne se mesure pas aux résultats électoraux. L’intelligentsia influence disproportionnellement la direction que prend son pays, notamment parce qu’elle parle à ceux qui ont le pouvoir de redistribuer l’argent public, de fixer les priorités éducatives ou d’orienter le débat public. Leur influence passe donc par d’autres canaux que les urnes: l’administration, les subventions publiques, les normes culturelles. Même lorsque la majorité ne vote pas pour les idées de l’élite, ces dernières peuvent quand même s’imposer.

Pour pallier ce problème, vous appelez à davantage de pluralisme dans les universités. Dans ce cas, faut-il chercher à recruter des platistes dans les départements de géographie? N’est-ce pas la rigueur des idées, plutôt que leur diversité, qui doit primer à l’université?

Je comprends votre objection. Mon idée n’est pas d’imposer du pluralisme partout, à tout prix. Mais, dans certains contextes, le pluralisme est une condition de la rationalité. En effet, lorsqu’une seule idée domine, le coût social de la déviation est tellement élevé que chacun est incité psychologiquement non pas à chercher la vérité, mais à rationaliser le consensus en vigueur. En revanche, lorsque toutes les opinions sont représentées, chacun peut choisir ses croyances pour leur valeur épistémique plutôt que pour leur valeur sociale.

Vous évoquez par ailleurs un biais courant: celui de confondre ce qui est compatible avec une théorie avec ce qui confirme cette théorie. Cette erreur expliquerait pourquoi l’ère de l’information est, contrairement à ce à quoi l’on pourrait s’attendre, un terreau fertile pour renforcer notre adhésion à des idées profondément erronées.

Oui. Par exemple, selon certains, l’existence d’une centaine de féminicides (entendus par là comme les meurtres de femmes par leurs conjoints) par an en France prouverait que nous habitons une société patriarcale. En réalité, cette triste réalité statistique est compatible avec la théorie du patriarcat, mais elle n’en est pas une confirmation, car même dans une société non patriarcale, il pourrait subsister des féminicides, simplement parce qu’il existe une minorité d’hommes violents. De même, l’observation d’instances de précarité économique en Occident est compatible avec l’hypothèse d’une faillite du capitalisme, mais elle n’en est pas une confirmation puisqu’elle peut coexister avec une autre observation (la réduction significative de la pauvreté sur plusieurs décennies) qui réfuterait la théorie. Malheureusement, il nous suffit de trouver un élément compatible avec une théorie que l’on affectionne pour la croire démontrée. C’est l’une des raisons pour lesquelles il est difficile de changer d’avis.

Pensez-vous que la structure même de l’université actuelle, hyper-spécialisée, renforce ce phénomène?

Oui, précisément. Ce qu’on appelle le «biais de confirmation» n’est pas vraiment un biais; il s’explique bien d’un point de vue évolutif. Les chercheurs Hugo Mercier et Dan Sperber montrent que, dans les sociétés préindustrielles, il était efficace qu’un individu accumule les arguments en faveur de sa propre position, pendant qu’un autre individu faisait de même pour la thèse adverse. La confrontation par le débat permettait ensuite à la tribu de trancher. Aujourd’hui, le débat contradictoire n’a plus lieu; chacun est bloqué dans une boucle d’éternelle auto-confirmation. A Harvard, par exemple, seuls 3% des professeurs se décrivent conservateurs. Cela crée un terrain favorable à l’irrationalité.

Vous faisiez écho plus tôt à l’absence de «skin in the game», concept popularisé par Nassim Taleb, selon lequel les intellectuels ne «jouent pas leur peau», et ne paient donc pas les conséquences de leurs fautes. Devrait-on davantage tenir les intellectuels responsables de leurs erreurs?

Je ne pense pas qu’il faille les punir pour leurs erreurs. Cela constituerait une pente glissante. Mais il faut garder à l’esprit que, comme le montre Thomas Sowell, ceux qui ne paient pas le prix de leurs erreurs ont plus de chances de se tromper. Par conséquent, il faut éviter de leur confier le pouvoir décisionnel. La centralisation, par exemple, retire le pouvoir aux citoyens ou aux collectivités locales, pour le concentrer entre les mains d’instances lointaines, qui ne rendent pas de comptes. De même, un politicien élu peut régulièrement être sanctionné par le vote, tandis qu’un fonctionnaire anonyme peut imposer des régulations parfois absurdes ou coûteuses, sans jamais avoir à subir lui-même les conséquences de ses erreurs. Les bureaucrates ne jouent jamais leur peau.

Une autre approche consisterait à s’organiser de manière à ce que la rationalité épistémique soit socialement récompensée. Est-ce possible?

C’est l’objectif derrière la méthode scientifique: aligner la reconnaissance sociale sur la recherche de vérité. Le mathématicien qui démontre un théorème est valorisé. Mais dans les sciences sociales, où il n’y a pas de critères de vérification clairs, cet alignement est plus difficile. D’autant que nous sommes souvent aveugles aux objectifs évolutifs que poursuit notre cerveau: nous sommes persuadés d’être mus par la quête de vérité (la rationalité épistémique), y compris lorsque notre raison nous oriente vers la rationalisation des croyances fausses et consensuelles.

Vous faites vous-même partie de cette classe d’intellectuels que vous critiquez. Que faites-vous pour éviter de tomber dans les pièges que vous décrivez?

Je tombe sans doute dans certains des pièges que je critique! L’irrationalité menace tout le monde. Il est vrai, par exemple, qu’étant de droite libérale, j’analyse surtout les erreurs de raisonnement de la gauche et des intellectuels illibéraux. Mais mon objectif est de raisonner sujet par sujet, d’adopter les idées que je juge justes – et seulement ensuite de voir dans quel camp cela me place, et non l’inverse.

Pensez-vous que la politique nous pousse nécessairement à l’irrationalité?


Dans une certaine mesure, oui, car la politique active nos instincts tribaux. Elle institutionnalise le réflexe clanique. Jonathan Haidt montre qu’en politique, nous devenons des attachés de presse: nous ne raisonnons pas pour découvrir ce qui est vrai, mais pour défendre les croyances de notre équipe. La politique nous pousse au raisonnement post hoc et au rejet automatique des arguments adverses, même au prix d’une bonne dose de mauvaise foi.

Vous terminez votre livre avec un plaidoyer pour la liberté d’expression, dans lequel vous vous montrez particulièrement critique envers la lutte contre les «fake news». En quoi est-ce compatible avec la recherche de la vérité?

La distinction entre faits et opinions est souvent plus floue que ce que l’on croit. Ceux qui prétendent «défendre les faits» ont parfois eux-mêmes une lecture idéologique. Pendant longtemps, dire que le Covid-19 provenait d’un laboratoire était considéré comme une «fake news», voire une théorie du complot – aujourd’hui, c’est une hypothèse crédible. Ce que cela démontre, c’est que décider qu’une chose est «un fait», et légitimer l’interdiction des discours contestant ce fait , c’est accorder un pouvoir exorbitant à ceux qui définissent ce que sont «les faits» – souvent une élite culturelle, politique ou technocratique. Or, ce que je montre dans mon livre, c’est que cette élite n’est pas seulement faillible – elle se trompe très souvent, et parfois lourdement!

Hannah Arendt disait que «la liberté d’opinion est une farce si l’information sur les faits n’est pas garantie et si ce ne sont pas les faits eux-mêmes qui font l’objet du débat».

Oui, et ce n’est pas seulement théorique: si Galilée vivait aujourd’hui, on le traiterait peut-être de complotiste. Même la loi Gayssot, en France, qui interdit la négation de la Shoah, me semble problématique. Non pas parce que je nie la Shoah – évidemment que non – mais parce que donner à l’Etat le pouvoir de trancher une fois pour toutes ce qui peut ou non être débattu, même lorsqu’il s’agit d’un fait historique établi, crée un précédent dangereux. Un jour, ce pouvoir pourrait être utilisé pour interdire la remise en question d’autres prétendus «faits» – comme l’idée que l’Occident serait «systémiquement» raciste – puisqu’on trouvera toujours une étude en sciences sociales pour le justifier.

Président de l’Association Café-philo, Yann Costa est rédacteur au Regard Libre. Ecrire à l’auteur: yann.costa@leregardlibre.com

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Samuel Fitoussi
Pourquoi les intellectuels se trompent
L’Observatoire
Avril 2025
270 pages

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