Les mercredis du cinéma – Alexandre Wälti
C’est peut-être l’histoire d’une exilée de l’intérieur. Non seulement Yvette Z’Graggen a grandi tiraillée entre la Suisse romande et ses origines alémaniques, mais elle figure parmi les écrivains hélvétiques dont l’œuvre mérite une attention particulière parce qu’elle a été construite en écho direct aux événements du XXe siècle. Une femme qui a toujours été en avance sur son temps, comme le montre parfaitement le documentaire Yvette Z’Graggen – Une femme au volant de sa vie de Frédéric Gonseth.
Pensons d’abord à son besoin d’indépendance précoce. Forcée ? Toute jeune déjà, elle écrit des histoires pour fuir la réalité. Elle vit la faillite d’un père dentiste, dépensier et un peu trop porté sur la boisson, levant parfois la main sur sa mère, tandis que la famille dégringole progressivement dans l’échelle sociale. Un passionné de belle voiture se retrouve soudain à pédaler sur un vélo. Un deux-roues qu’Yvette Z’Graggen utilise ensuite pour faire le tour de du pays durant les années silencieuses de la Seconde Guerre mondiale. Une enfance où l’imagination sert d’abri contre les réalités et qui est nourri très tôt par un besoin d’apprendre malgré l’impossibilité – due à des questions financières – de faire l’université.