Les mercredis du cinéma – Melisa Oriol
Let’s Dance est le premier long-métrage du metteur en scène et désormais réalisateur Ladislas Chollat. Bien que ses premiers pas dans le domaine du cinéma soient maladroits à bien des égards, il n’en ressort pas que du mauvais!
Dans les films de danse, il est difficile de se démarquer des autres tant les concurrents sont nombreux. Bien souvent, dans les dance movies, les protagonistes évoluent dans des milieux opposés, puis une histoire d’amour un peu niaise vient unir un jeune homme arrogant et urbain avec une jeune femme classique et timide. Let’s Dance ne déroge pas à la règle. La rencontre entre Joseph (Rayane Bensetti) et Chloé (Alexia Giordano) va pousser le milieu du hip-hop dans les bras de la danse classique.
Aujourd’hui fréquemment réunis, ces deux styles donnent bien souvent lieu à des chorégraphies tout à fait remarquables. Cependant, et c’est là un aspect bien décevant du film: l’amourette entre les deux adolescents empiète un peu trop sur les séquences de danse. De gros plans interminables sur le visage des acteurs principaux viennent entacher le motif le plus important du film, à savoir: la danse! On aimerait en voir plus.
D’autant que Brahim Zaibat, ex-champion du monde de breakdance, se trouve dans le casting. Le plaisir de le voir danser est malheureusement très bref. S’il a réussi à atteindre les sommets de la danse, son jeu d’acteur, en revanche, laisse à désirer. Mais il n’est pas le seul. On ne va pas se mentir, la sélection des acteurs n’est pas très bonne. Il est d’ailleurs plus agréable de les voir s’exprimer visuellement que verbalement. De tous, c’est peut-être l’acteur Mehdi Kerkouche (Karim) qui relève le niveau général par son jeu naturel et son personnage attachant.
Tournent tournent et puis s’en vont…
En ce qui concerne l’aspect visuel et la manière de filmer la danse, c’est un choix surprenant qui a été opéré. Le film morcelle les chorégraphies, un peu à l’image des pas de danse. Lors de la première séquence, dans laquelle Joseph fait une démonstration de son style hip-hop, la caméra tourne autour de lui, le fragmente et sublime chacun de ses mouvements.
Des ralentis judicieusement placés viennent magnifier les figures les plus complexes. Voilà un parti pris tout à fait intelligent, mais qui pose parfois problème. C’est le cas du solo magique de Chloé, dans lequel, en larmes, elle danse dans un studio tard dans la nuit. Dans une ambiance onirique et illuminée uniquement d’une faible lumière, on tourne autour d’elle. Les premiers tours donnent l’impression que la caméra danse une valse avec la jeune protagoniste. Puis, plus les minutes défilent et plus cette «valse» tourne en ivresse et donne le tournis. La vitesse progressive des mouvements de caméra rend l’image floue et gâche ce moment des plus délicieux.
Malgré les tâtonnements, les chutes et les tentatives plus ou moins réussies du film, il y a un point sur lequel il a su se distinguer. L’intelligence dans l’écriture scénaristique de la scène finale est un vrai succès. Celle-ci est surprenante et réellement splendide. Let’s Dancea innové là où la majorité des autres films de danse se sont cassé la figure en réitérant ou copiant fadement ce qui a déjà été vu mille fois.
C’est un triomphe tant au niveau narratif que visuel. Sans spoil, la fin est réellement la synthèse de l’histoire de deux mondes parallèles – le hip-hop et le classique – qui se rencontrent pour former leur propre univers. Le tout sur une musique, qui elle aussi permet une rencontre, celle entre Max Richter et Vivaldi. Il en résulte un remix des quatre saisons tout à fait époustouflant et enjoué. Le film vaut le détour, ne serait-ce que pour cette scène finale.
Ecrire à l’auteur: melisa-orl@hotmail.com
Crédit photo: © Pathé Films
LET’S DANCE |
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FRANCE, 2018 |
Réalisation: Ladislas Chollat |
Scénario: Ladislas Chollat, Joris Morio |
Interprétation: Rayane Bensetti, Alexia Giordano, Guillaume de Tonquédec, Mehdi Kerkouche, Brahim Zaibat, Line Renaud |
Production: Federation Entertainment, Empreinte Cinéma, Pathé, Vertigo Films, M6 Films, Nexus Factory, UMedia, CN7 Productions, Jouror Productions |
Distribution: Pathé Films |
Durée: 1h40 |
Sortie: 27 mars 2019 |