Popularisé sous le pseudonyme L’Odieux Connard, Julien Hervieux revendique le slogan «Qu’il est bon d’être mauvais!». Dans son nouveau livre, il démonte avec délectation les plus grands affreux qui ont jalonné l’histoire.
La fiction, comme l’histoire, aime les héros. Et pourtant, rien ne donne autant de profondeur au récit qu’un bon méchant. Que serait Batman sans le Joker? Luke Skywalker sans Dark Vador? Clarice Starling sans Hannibal Lecter? Ce sont ces grands affreux qui mettent véritablement du sel dans l’histoire et qui font avancer la trame narrative. La fiction ne s’est d’ailleurs pas privée de s’emparer de ces personnages en multipliant films et séries sur leurs origines, qui tentent d’expliquer comment un enfant innocent est devenu, un jour, un horrible psychopathe.
Dans la vraie vie aussi, les méchants pullulent. Ils disposent même désormais d’un abécédaire qui recense les plus grands salauds des deux derniers millénaires, grâce au Dictionnaire jubilatoire des méchants de l’histoire, publié aux Editions Harper Collins. L’auteur, Julien Hervieux, s’est une nouvelle fois allié au dessinateur Monsieur le Chien, avec qui il avait déjà collaboré pour Le Petit théâtre des opérations, en publiant des bandes dessinées consacrées aux deux guerres mondiales.
Il y a les grandes figures de l’histoire au travers de ces 250 pages: Hitler, Staline ou Gengis Khan ont, à eux seuls, causé des millions de morts. On découvre par ailleurs des empereurs pyromanes, des généraux sanguinaires ou des princesses sadiques. Il y a également des personnalités largement moins connues du grand public, qui ont tué à plus petite échelle. Petit médecin sans problèmes, Marcel Petiot s’est avéré être un serial killer qui brûlait ses victimes dans la cave de son hôtel particulier à Paris. L’Anglaise Mary Ann Cotton, quant à elle, a empoisonné trois maris, sa mère et une douzaine de ses enfants.
Une galerie de portraits désopilante
Ce livre fait donc le portrait de petits ou de grands criminels. Des hommes et des femmes, dont certains ont montré des tendances à l’homicide ou à la torture dès l’enfance. Ils ont pu agir par simple appât du gain, par soif de pouvoir, égoïsme, ennui, ou par idéologie. Si, souvent, la fiction les a dépeints comme des personnages cruels et détestables, force est de constater que la réalité était encore bien pire.
C’est que Julien Hervieux est un ancien professeur d’histoire. Il connaît son affaire et propose des faits qui sont, autant que faire se peut, démontrés par la recherche. Auteur d’une chaîne YouTube, il a aussi compris l’intérêt de ne pas parler d’histoire trop sérieusement, si l’on veut appâter le chaland. Le ton est donc, comme toujours chez Hervieux, mâtiné d’humour noir et d’irrévérence. Cela fait souvent mouche. On rit beaucoup en lisant cet ouvrage, qui va tout de même parfois un peu trop loin dans l’impertinence.
Mais on le referme tout de même avec un certain malaise. Car il y a une constante dans tous ces portraits et elle fait froid dans le dos. Elle montre en effet à quel point l’être humain est inventif, quand il s’agit de faire souffrir, voire d’éliminer purement et simplement son prochain. Cela ne date pas d’hier, si l’on en croit les personnages évoqués dans ce dictionnaire. Et cela ne risque pas, malheureusement, de s’arrêter de sitôt.
Ecrire à l’auteure: sandrine.rovere@leregardlibre.com
Vous venez de lire une critique en libre accès, publiée dans notre édition papier (Le Regard Libre N°112). Débats, analyses, actualités culturelles: abonnez-vous à notre média de réflexion pour nous soutenir et avoir accès à tous nos contenus!

Julien Hervieux, Monsieur le Chien
Le Dictionnaire jubilatoire des méchants de l’histoire
Harper Collins
Octobre 2024
252 pages