Les mélodies du jeudi – Karim Karkeni
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Anouar Brahem, le joueur de oud et compositeur tunisien, a sorti l’automne dernier un album tout en douceur et rondeurs, Blue Maqams. Il sera les 11 et 12 avril en Suisse, respectivement à Zurich (Tonhalle) puis à Bâle (Musical Theater). Envoûtement garanti.
L’album était dans les bacs pour fêter ses soixante ans, à une semaine près. Un vendredi 13 (octobre), afin d’insuffler un peu plus de magie et de mystère. On se demandait comment il allait nous revenir, après le fabuleux double album Souvenances, paru en 2014. Il avait mis du temps à le composer, tant étaient nombreux les éléments se bousculant dans sa tête et sa poitrine, après la révolution en Tunisie ; il lui en aura été de même pour ce nouvel opus.
Un nouveau musicien pour cet album
Le jazzman a décidé de continuer d’accorder autant d’importance au piano, mais de changer de musicien – cela faisait des années que François Couturier tissait des merveilles à ses côtés, Le pas du chat noir étant peut-être, à ce niveau-là, le plus emblématique. Brahem a eu de la peine à trouver son homme, jusqu’à ce que Manfred Eicher, son producteur, lui parle de Django Bates.
C’était exactement ce doigté et cette subtilité qu’il fallait pour envelopper le oud du maître de cérémonie. Et puis, après vingt ans sans contrebasse, Anouar Brahem avait envie de retrouver Dave Holland, avec lequel il avait beaucoup aimé travailler sur Thimar, sorti en 1998.
Envoûtement et embarcation
Le premier morceau, Opening day, se déplie avec un esprit d’invitation. On y entend d’abord les cordes du oud, puis celles de Dave Holland ; ensuite, très discrètement, les percussions de Jack DeJohnette, avant que le clavier de Django Bates s’invite dans cette séquence de velours.
Du propre aveu de l’artiste, la batterie peut surprendre, dans cette musique s’apparentant par bien des aspects à de la musique de chambre, mais il avait envie de relever le défi, et il savait que la finesse des musiciens résoudrait cette gageure.
En effet, au fil de neuf compositions inspirées et inspirantes, le quatuor nous caresse dans le sens des voiles, peut-être celles de l’arche de Noé que l’on va bientôt devoir s’inventer, avec cette pluie qui n’en finit pas de nous assommer.
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Crédit photo : © Marco Borggreve