Les mercredis du cinéma – Kelly Lambiel
Des chansons entraînantes, des fourrures plus ou moins hirsutes et des chorégraphies virevoltantes. Nul doute, nous voici face à l’adaptation cinématographique de la très célèbre comédie musicale Cats. Pas vraiment fan du genre en question, mais consciente du succès rencontré par cette production londonienne ayant su conquérir Broadway puis le monde, me voilà intriguée par ce que cette mise en images a à offrir. Appelons un chat un chat, si je n’en suis pas sortie les poils hérissés, je ne peux cependant pas dire que j’aie été emportée.
La loi du moindre effort
Certes, le défi est de taille. Comment adapter au cinéma une histoire dont la trame narrative, basée sur une série de poèmes pour enfants de T.S Eliot, est constituée d’une suite de tableaux chantés et dansés plus que d’une véritable intrigue? Comment donner vie à des matous humanisés de façon plus ou moins réaliste en évitant d’affubler ses acteurs des costumes kitsch, so eighties, qui continuent pourtant à faire le succès de Cats sur les planches? Je ne le cache pas, je n’ai pas de réponse à ces questions.
J’espérais toutefois que Tom Hopper qui nous a épatés avec Le Discours d’un Roi, oscarisé à plusieurs reprises, The Danish Girl et Les Misérables, lui, saurait y répondre. Je regrette malheureusement que compter seulement sur l’aide des effets spéciaux et d’un casting qui aurait fait envie à plus d’un réalisateur soit la solution pour laquelle il a finalement opté. Se reposer sur les têtes d’affiche que sont Judi Dench, Idris Elba, Jennifer Hudson, Rebel Wilson ou encore Ian McKellen pour porter un film dont le scénario, à peine retravaillé pour garder l’esprit music-hall, laisse à désirer et n’est ici pas suffisant.
On suit donc Victoria, abandonnée par ses maîtres dans un quartier de Londres où vivent les Jellicle Cats. Une fois par année, leur chef, le sage Deutéronome (Judi Dench) les réunit pour choisir qui parmi eux est digne de rejoindre la félinosphère et de recommencer une nouvelle vie. Parmi de truculents minous tels que le charmant Rum Tum Tugger (Jason DeRulo), le gourmand Bustopher Jones (James Corden), la séductrice Bombalurina (Taylor Swift) ou la déchue Grizabella (Jennifer Hudson dont l’interprétation de Memory est remarquable et touchante), se trouve évidemment le grand méchant de l’histoire, Macavity (Idris Elba).
Des choix peu judicieux
Bien que le jeu soit de qualité, le chant aussi d’ailleurs, que le film soit teinté d’humour et que la capture de mouvement permette de ne pas figer les expressions faciales ou corporelles des ces êtres hybrides, le rendu manque étrangement de naturel. Notamment en ce qui concerne le personnage principal sur qui, pour moi, les effets visuels sont totalement ratés. Manque de chance, c’est elle que l’on voit le plus à l’écran.
Si la grâce et la virtuosité de cette dernière, interprétée par la danseuse étoile du Royal Ballet Francesca Hayward qui fait ici ses débuts au cinéma, sont préservées, on peut déplorer le fait d’avoir engagé des danseurs professionnels dont les qualités sont peu mises en avant, tant les gros plans prennent le dessus sur les plans d’ensemble et les chorégraphies. Perdus parmi les stars qui leur volent la vedette, hors-cadre trop souvent et diminués par des décors démesurés et peu crédibles, ils ne semblent servir qu’à étoffer le groupe.
En rédigeant cet article, j’apprends qu’avant d’en être finalement retiré, Cats faisait partie de la liste des films proposés aux Oscars par Universal. Une décision qui, en réalité, ne m’étonne guère, puisque, de mon point de vue, Tom Hopper s’est trop reposé sur la notoriété dont jouissait la comédie musicale. Excepté pour l’ajout de la chanson Beautiful Ghosts, les choix opérés desservent sa réadaptation dont les points positifs ne sont finalement que ceux déjà présents dans la version originale. Si «la nuit, tous les chats sont gris», dans les salles obscures par contre Cats n’aura pas eu la capacité de nous duper.
Ecrire à l’auteur: kelly.lambiel@leregardlibre.com
Crédit photo: © Universal Pictures