Nous avions commencé ce mois cinématographique avec Rock ‘n Roll, le navet de Guillaume Canet. Nous terminons le mois avec un film de la même espèce: une comédie où un jeune réalisateur bobo de Paris se met lui-même en scène avec sa compagne. En tous points, le long-métrage signé Nicolas Bedos est mieux réussi que celui de Guillaume Canet, à commencer par l’optique choisie.
En effet, Bedos n’a pas choisi comme Canet de situer l’histoire au même stade temporel que la réalité. Le réalisateur a choisi de raconter l’histoire d’un couple dans la durée. En somme, d’imaginer sa vie avec Doria Tillier depuis l’instant de leur rencontre jusqu’à sa mort. L’idée est excellente, et le choix des acteurs est bon. Dans la salle, on rit beaucoup. Le film fonctionne. Cependant, il faut tout de même lui reconnaître un certain nombre de défauts.
Tout d’abord, et c’est ce qui saute aux yeux de chaque spectateur, le film contient trop d’éléments, trop d’idées, trop d’histoires intriquées… trop de tout. Pas moins de quatorze chapitres et un épilogue se succèdent pour une durée totale de cent-vingt minutes. Deux heures, deux heures sur la vie du réalisateur ! Et en même temps, bien trop de séquences qui se retrouvent trop courtes pour qu’on puisse véritablement se prendre à l’histoire. Les études, la famille, la célébrité, la drogue, la maladie, l’infidélité, tout y passe. Peut-être eût-il mieux fallu choisir quelques aspects et les approfondir.
Ce choix plus que discutable s’accompagne d’une bande sonore à côté de la plaque. A vouloir tout faire, Nicolas Bedos ne peut exceller en tout. C’est en effet lui-même qui s’est chargé du scénario, de la réalisation, du jeu de l’acteur principal et de la composition musicale. Dans ce film, la musique est trop mièvre et trop hétérogène, comme les autres facettes du film justement. Rien ne surprend, à l’exception de l’excellente fin qui nous fait dire: «Dommage! Si tout le film était comme ça, ce serait un chef-d’œuvre!»
Les décors, ensuite, remportent plusieurs anachronismes, que ce soit dans les meubles ou les vêtements. Tout semble avoir été réalisé à la va-vite. Le film se veut historiquement et politiquement marqué; qu’il le soit alors!
Enfin, pourquoi Nicolas Bedos se lance-t-il un tel défi alors même qu’il s’agit de son premier long-métrage? L’homme se lance dans le cinéma, et sa première oeuvre doit concerner sa propre existence! Voilà une bien curieuse attitude. Comme si Bedos devait prouver à l’écran qu’il a de l’humour sur lui-même. Avec bien sûr beaucoup d’allusions sexuelles, car cela semble être une habitude de plus en plus indispensable dans l’art actuel. Cette surabondance d’autodérision risque d’être rapidement prise pour de l’auto-complaisance, et à raison.
Malgré toutes ces considérations, le film possède moult qualités. Autant la nouvelle Dorai Tillier que les expérimentés Pierre Arditi et Denis Podalydes (dans le rôle excellent du psychologue) donnent du très bon cinéma. La lumière est excellente. Nous nous trouvons dans de la comédie de qualité. Nicolas Bedos peut être fier d’avoir osé une telle entreprise artistique à son stade. Et nous ne pouvons lui souhaiter de passer que du bonheur avec sa magnifique dulcinée.
Ecrire à l’auteur: jonas.follonier@leregardlibre.com