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«Notre-Dame brûle»: un thriller étouffe-chrétien4 minutes de lecture

par Fanny Agostino
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Les mercredis du cinéma – Fanny Agostino

Sidération, inquiétude et attente. Tel fut l’état d’esprit partagé par bon nombre de Parisiens le 15 avril 2019, lorsque la cathédrale de Notre-Dame de Paris s’embrasait dans la panique générale. Jean-Jacques Annaud (Le Nom de la Rose, La vérité sur l’affaire Harry Quebert) en propose le récit, sous une forme strictement chronologique. Aux allures documentaires, la fiction nous plonge dans un thriller qui colle aux événements. Le nez dans sa soupe, le réalisateur manque malheureusement de perspective.

Stoppons tout de suite les spéculations les plus folles. Annaud ne livrera aucune «vérité» sur les causes de départ de l’incendie. Le début du film évoque plusieurs pistes: un mégot incandescent, de vieux produits inflammables laissés à l’abandon, la vétusté de la charpente et le manque d’entretien. Fidèle aux événements, le réalisateur déploie les points de vue, les circonstances hasardeuses – parfois invraisemblables – qui ont mené à la destruction de la flèche de Viollet-le-Duc et entraîné une brèche dans la voûte centrale du monument. De la touriste américaine aux combattants du feu, le temps s’écoule et le drame s’accentue. Le spectateur est pris au piège de l’instant, comme les pompiers le sont par les flammes.

La première vingtaine de minutes de film se détache de la tournure catastrophique – faudrait-il dire apocalyptique? – et angoissante de la seconde partie. La première moitié décrit les alentours de la cathédrale et la population incessante qu’elle brasse du matin au soir. A travers les plans successifs, l’histoire de Notre-Dame se dévoile… et s’invente: les chiffres énoncés par les guides ne sont jamais identiques, le ton de la mise en scène est parfois ironique envers les visiteurs armés de perches à selfie. Les plans s’épuisent à scruter les recoins de Notre-Dame: les vues panoramiques se multiplient, les travellings et le montage rapide insufflent un rythme éblouissant et enchanteur au film.

La ferveur sans l’audace

Puis, la narration bascule du point de vue des soldats du feu. Tout au long de la fiction, on ressent le respect du réalisateur pour ces hommes et ces femmes qui se sont retrouvés en première ligne. Fruit d’une longue enquête menée par les équipes d’Annaud, l’itinéraire et les actions des pompiers sont méticuleusement rapportés. L’impossibilité d’intervenir immédiatement à cause de la densité du trafic autour de l’île de la Cité, le sauvetage malencontreux de la Couronne d’épines, le flou des décisions prises par Emmanuel Macron…

Une complexité qui n’est pourtant jamais abordée à distance; le spectateur est mis sous tension, absorbé par une bande-son tonitruante et des images de reconstitution de la cathédrale en feu. L’effervescence prend aux tripes et ne nous laisse aucun répit. Même si le film se construit comme un thriller, on aurait sans doute apprécié quelques instants de respiration, sous forme de flashback par exemple.

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A ce défaut s’ajoute celui du penchant ostentatoire des scènes prônant une part mystique aux événements. Le miracle de l’édifice toujours debout enthousiasme Annaud à reproduire une effervescence religieuse. La piété est caricaturée à l’extrême, comme le dialogue entre deux pompiers sur le sauvetage du calice ou une séquence de prière digne du Titanic… Trop en prise sur son histoire, Notre-Dame brûle… mais pas le cœur du spectateur.

Ecrire à l’auteure: fanny.agostino@leregardlibre.com

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