Le film de Roland Jaccard: Le suicide, une forme d’ascèse
LE FILM DE Roland Jaccard | Quand j’avais demandé à Cioran pourquoi il ne s’était pas suicidé (question toujours délicate à poser, surtout à un homme sur le déclin), il m’avait répondu: «J’ai laissé passer l’heure et maintenant il est trop tard….je n’ai plus le courage, ni la force de mettre un terme à ma vie… quelle erreur que d’avoir attendu!» Sans doute eût-il jugé cette erreur plus terrible encore s’il avait su le cauchemar qu’il allait endurer pendant des années. Le prix à payer pour avoir reculé devant la mort volontaire, s’il l’avait connu, l’aurait sans doute incité à prendre congé d’un monde qu’il vomissait mais qui, étrange paradoxe, ne cessait de l’émerveiller. D’autant que le vieillissement – et c’est l’un de ses traits terribles, note Drieu La Rochelle – vous donne la gaîté de cœur qui permet d’accepter comme allant de soi des retranchements sur les sens et sur le cœur considérés auparavant comme de monstrueuses avaries.