Le Regard Libre N° 17 – Jonas Follonier
Le français, ce n’est pas n’importe quelle langue. Et une langue, ce n’est pas n’importe quoi. Pourtant, à en croire les linguistes eux-mêmes, si. Je sors d’une conférence académique intitulée «Les Rectifications orthographiques du français». Avant de pouvoir parler de rectifications, ne faudrait-il pas au moins que les réformes en question fussent justes, et donc justifiées?
C’est bien là tout le problème: la nouvelle orthographe initiée par quelques individus dans les années 1990 et reconnue en 2016 par le ministère de l’Education nationale nous est présentée comme une évolution normale et utile. Abandonner des structures jugées «archaïsantes» et simplifier des règles «étymologiques» participeraient de l’idée que «toute langue évolue».
Bien sûr qu’il est normal et bon que toute langue évolue, mais toute évolution de la langue n’est pas normale et bonne. Dans tous les domaines, chaque changement doit être pesé, réfléchi et surtout motivé. Si tout changement était bon du moment qu’il transgresse le passé, alors très bien, dans ce cas-là écrivons n’importe quoi. Supprimons la bonne vieille lettre «b», par exemple.
A la fin de la conférence, j’ai posé une question en toute sympathie: comment justifie-t-on l’abandon d’accents circonflexes? La salle cria au loup, on caqueta. J’étais désormais enveloppé d’odeurs réactionnaires; des lunettes finkielkrautiennes se dessinaient sur mon visage qui avait osé ouvrir le dialogue. Désespéré par le dogmatisme d’un camp se disant «ouvert», je garde cependant espoir: le peuple, que ces pseudo-élites croient défendre mais qui au contraire trouve leurs réformes insensées, continuera à aimer et écrire notre belle langue comme il se doit.
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