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Accueil » «Le dernier été en ville», l’ivresse de la dolce vita

«Le dernier été en ville», l’ivresse de la dolce vita4 minutes de lecture

par Quentin Perissinotto
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le dernier été en ville

Le dernier été en ville est un chef-d’œuvre sorti de l’oubli. Publié en Italie dans les années 70, le roman connaît un rapide succès, devient immédiatement épuisé et reste longtemps introuvable sur les étals des librairies transalpines, s’arrachant comme un trésor perdu chez les bouquinistes. Et soudainement, en février 2021, le voilà qui refait surface en France, sous la jaquette crème de Gallimard! Il vient d’ailleurs de sortir en édition poche. Il n’y a donc plus aucune excuse pour ne pas l’acquérir, le lire et le relire.

«Quand je sortis, un vent glacial, à vous couper les mains, lustrait la ville sous un ciel resplendissant, à vous briser le cœur.»

Ce roman raconte l’arrivée à Rome d’un jeune Milanais venu essayer de faire carrière dans le journalisme. Aux journées qui se ressemblent toutes atrocement, Leo Gazzarra préfère les déambulations nocturnes et les égarements alcoolisés aux côtés de la bourgeoisie romaine, où jamais l’univers vacillant ne semble se cogner contre les reflets de la lune endormie. Leo Gazzarra erre dans un monde qui ne lui appartient pas et ne cherche nullement à s’y soustraire; il flotte simplement dans la ville comme un éther, ses rêves de gloire s’évanouissant à la vapeur du petit matin, ne laissant aucune traînée dans cette capitale alanguie par la touffeur d’un été de plomb. 

«– Elle est imprévisible.
– Elle est belle, très cher, et les gens beaux sont toujours imprévisibles. Ils savent que quoi qu’ils fassent ils seront pardonnés.»

Le fil d’Arianna

Toutefois, lorsque les désillusions drapent le quotidien, il reste l’amour pour tout dynamiter: la nuit de ses trente ans, lors d’une soirée aussi raffinée qu’avinée, son regard croise la silhouette d’Arianna, une jeune femme irradiante de beauté, exubérante de séduction, mais à la fragilité dévoilée. A la fulgurance du coup de foudre succèdent bien vite les ténèbres d’un inlassable chassé-croisé. Arianna apparaît puis se dérobe, comète de feu et de glace. Hagard, Leo peine à se remettre de cette collision avec la douleur de la beauté et se laisse dériver dans le sillage de cette créature évanescente. Un tango existentiel sous les traits d’une hypnose crépusculaire.

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Le dernier été en ville est le portrait d’un héros mélancolique dans la Rome de la dolce vita. La peinture des grandeurs qui s’effritent, pour joncher le sol comme les paillettes après la fête. Mais c’est surtout le magnétisme de l’écriture de Calligarich. Elle a l’élégance désinvolte des silhouettes vêtues de lin et flânant le long des bords de mer; elle se fait esthète des douleurs, amertume des silences et brûlure de l’inachevé. Son style est la politesse du désespoir, la douceur des négations radicales. Le dernier été en ville est la flamboyance des larmes au soleil.

Ecrire à l’auteur: quentin.perissinotto@leregardlibre.com

Crédit photo: © Quentin Perissinotto pour Le Regard Libre

Gianfranco Calligarich
Le dernier été en ville
Trad. française de Laura Brignon
Gallimard
2021 [1973
]
212 pages

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