Au bord du lac de Neuchâtel, aux pieds des Jeunes Rives, se niche la Faculté des lettres et sciences humaines de l’Université, sise à l’Espace Louis Agassiz. Cet espace porte le nom d’un grand scientifique américano-suisse du XIXe siècle, Jean Louis Rodolphe Agassiz, devenu professeur à l’académie de Neuchâtel, qui allait devenir ce que les contemporains appellent «l’UniNE».
Seulement voilà, c’était sans compter les bien-pensants qui peuplent les différentes ramifications étatiques. Louis Agassiz était un raciste, il fallait donc, d’urgence, ôter son nom de cet espace et le remplacer par celui, plus politiquement correct, de Tilo Frey, qui a la triple compétence d’être une femme, une métisse et une «pionnière de l’égalité». La proposition a été formulée par le Conseil général de la Ville de Neuchâtel et validée par le rectorat de l’Université.
J’espère, mais peut-être ai-je tort, que l’idéologie de l’hygiénisme moral n’est pas si puissante au sein du rectorat de l’Université de Neuchâtel qu’elle fait oublier à ses membres très instruits l’absurdité qui consiste à vouloir censurer le passé pour des raisons liées à nos valeurs actuelles. Pourvu qu’ils aient pris cette décision pour des motifs utilitaires, pragmatiques: une petite université comme celle de Neuchâtel ne peut compter que sur ses étudiants pour survivre, elle doit donc montrer patte blanche – si j’ose – auprès des potentiels candidats américains. Si tel est le cas, on les comprendra. A la limite.
Il n’empêche, toute cette histoire a été mise sur la table par un organe politique, le Conseil général de la Ville. C’est à eux que je m’adresse en m’insurgeant. Quand on célèbre la mémoire d’un homme comme Agassiz, personne, strictement personne ne pense que c’est pour ses thèses raciales, partagées par la majorité des anthropologues de son temps. C’est le naturaliste à la renommée mondiale qu’on loue, celui qui a co-fondé l’Université ainsi que le Musée d’histoire naturelle de Neuchâtel. Celui qui, par ses apports en zoologie et en géologie, s’est vu créer une chaire par l’Université de Harvard.
Mais non, alors qu’il y aurait tellement à faire pour rehausser le niveau des universités, faire en sorte que les étrangers s’intègrent, s’engager pour l’égalité des salaires, on préfère créer un faux problème.
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