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«Le jeu de la dame» doit beaucoup à sa reine4 minutes de lecture

par Kelly Lambiel
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Article inédit – Kelly Lambiel

Taciturne et exigeante, Beth Harmon l’est depuis son plus jeune âge. C’est le regard affirmé et perçant que l’orpheline lance un ferme «apprenez moi à jouer», ne laissant finalement au vieux Mr. Shaibel, d’abord peu enclin à jouer avec «une petite fille», que peu de chances de refuser. Et très rapidement, l’élève finit par surpasser le maître. Puis les maîtres. C’est qu’elle impressionne, elle déstabilise. Alors qu’elle n’y comprend encore pas grand-chose, après n’avoir observé qu’une ou deux fois, de loin, le vieux gardien jouer au sous-sol, elle sait déjà. Elle voit. Les cases ne portent pas encore de noms, les parades lui sont totalement inconnues et la dame n’est pour le moment qu’une «grande pièce qui peut aller partout», mais elle apprend vite. Bientôt, c’est elle qui ira partout.

Seulement, le génie se paie. Et le prix est élevé car il s’accommode rarement et plutôt mal avec la vie saine et bien rangée qu’on attribue volontiers à une adolescente des années cinquante. A mesure que Beth construit sa carrière, c’est son équilibre mental qui se détériore. Plus son jeu devient précis, maîtrisé, plus elle perd pied. Et le décalage se fait grand, le vide à combler immense. C’est là tout le paradoxe de la joueuse du plus solitaire des jeux de société. Sous cette chevelure rousse impeccablement coiffée, derrière le glamour de ses tenues vestimentaires, de ses ongles parfaitement limés et vernis, que se cache-t-il? Qu’y a-t-il derrière ces yeux qui tuent aussi imperceptiblement qu’ils dévorent, ces gestes qui caressent aussi efficacement qu’ils achèvent?

Beth est énigmatique. Insaisissable, mais irrésistible. Et la série, véritable petit bijou, doit beaucoup à son actrice principale qui crève véritablement l’écran et la porte de bout en bout dans une parfaite retenue. Anya Taylor-Joy a une gueule, certes, et belle qui plus est. Mais c’est son jeu – son regard plus précisément – et sa gestuelle – ses mains en particulier – qui donnent à son rôle toute sa profondeur. Sensuelle et froide, constamment sur la brèche, faite aussi bien d’instinct que de contrôle, elle rend non seulement les échecs sexy mais la série addictive. Le rythme est lent, oui, mais la photographie, les costumes et les décors soignés, la bande-son entraînante. A cela il faut encore ajouter une écriture intelligente qui permet d’éviter les écueils du teen movie ou du drame familial; d’écarter le sentiment de déjà-vu. Simple, mais profond. En un mot, efficace. Netflix nous met échec et mat.

Ecrire à l’auteure: kelly.lambiel@leregardlibre.com

Crédit photo: © Netflix

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