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Violences conjugales: la petite graine en chacun de nous5 minutes de lecture

par Diana-Alice Ramsauer
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Mathieu Palain

«Nos pères, nos frères, nos amis: dans la tête des hommes violents». Le titre est clair, les auteurs sont aussi les mecs sympas et les êtres aimés. Petit plus: Mathieu Palain nous pousse à nous demander quel maillon de la chaîne de la violence nous occupons.

Les témoignages et les histoires de violence intrafamiliale ou conjugale sont de plus en plus répandus dans l’espace public. C’est comme si les freins avaient soudain lâché, permettant à toute une catégorie de la population de parler. Bon nombre d’ouvrages prennent la perspective des victimes, des personnes qui reçoivent les coups, qui subissent les pressions. Ce récit-là est différent. Pour comprendre (et non excuser), le journaliste et écrivain Mathieu Palain a cherché à rencontrer ceux qui frappent. Expédition difficile, car dans ce rôle-là, très peu sont prêts à témoigner.

La première porte d’entrée de l’enquêteur sera un groupe de parole sur les violences conjugales. Des personnes forcées à participer à un stage après avoir été condamnées. La grande majorité se considère comme victime et tente de justifier ses actes. La violence est souvent vue par ses auteurs comme une réaction (légitime) à un obstacle. Les coups sont une option parmi d’autres, l’expression d’un désaccord, un acte viril, voire encouragé.

Omerta chez les bourgeois

Mais très vite, Mathieu Palain se rend compte que dans ces groupes de discussion, une frange de la population est aux abonnés absents: la haute société, les puissants, les notables. En effet, pour avoir récolté le témoignage de femmes pendant quatre ans, il sait pertinemment que la violence n’est pas inversement proportionnelle au salaire. Les récits d’Amélie, directrice d’un théâtre et compagne de banquier, Cécile, étudiante et fille de cardiologue maltraitant, une anonyme journaliste et épouse d’un haut cadre de la fonction publique, le prouvent.

La violence au sein de ces milieux est toutefois invisibilisée et le jeune enquêteur peine à rencontrer les maris, compagnons et partenaires. «Je prenais conscience que les hommes violents s’en sortent quand ils sont puissants. Si vous êtes Blanc, bien inséré dans la société, et que vous jouissez d’un peu de pouvoir – pas besoin d’en avoir beaucoup –, vous pouvez y aller, il ne vous arrivera rien.» Entorse aux règles du jeu que Mathieu Palain s’est pourtant fixées: les coups sont, cette fois-ci, racontés par les femmes.

Le livre ne s’arrête cependant pas à la recherche de témoignages. Il offre également quelques pistes de compréhension. Pourquoi cette violence? D’où vient-elle? Elle est tour à tour décrite, comme une maladie, comme une petite graine et dans tous les cas, comme un cercle vicieux.

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Réfléchis… et dans tes relations?

S’il serait contre-productif de remettre en cause l’importance du genre dans les questions de violences, Christine, l’une des conseillères pénitentiaires citées dans le livre, aime parler de «pathologie du lien». Pour elle, l’image de l’homme autoritaire et de la femme soumise est un cliché. Elle affirme qu’il faut travailler sur la relation, en évitant d’être manichéen et de désigner un gentil et un méchant, même s’il y a évidemment un coupable au nom de la loi.

Les réflexions proposées dans le livre permettent à toute personne qui l’ouvre de se positionner sur sa place en matière de reproduction de la violence. Tout d’abord – et c’est probablement encore la priorité – la question est aujourd’hui posée aux hommes, puisqu’il est clair que les jugés pour violence sont majoritairement de sexe masculin. Chacun est alors amené à se demander quelle est sa propre part dans la problématique: même si l’on est bien éduqué et même si l’on est un bon type.

Une fois que la prise de conscience sera globalement amorcée, il y aura ainsi la place pour toute personne de se positionner sur sa part de violence individuelle, intrafamiliale et sociétale. Chacun et chacun pourra alors œuvrer à réparer les liens dysfonctionnels. 

Ecrire à l’auteur: diana-alice.ramsauer@leregardlibre.com 

Crédit photo: © DR

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Mathieu Palain

Mathieu Palain 
Nos pères, nos frères, nos amis
Dans la tête des hommes violents
Editions Les Arènes 
2023
252 pages

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