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L’UDC et les autres4 minutes de lecture

par Jérémie Bongiovanni
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Les lundis de l’actualité – Jérémie Bongiovanni

«En fait d’avenir, les prétendus esprits progressifs n’ont l’initiative sur rien.»
François-René de Chateaubriand

Alors que l’élection de deux nouveaux conseillers fédéraux et les élections fédérales nous mènent vers des semaines passionnantes pour la politique suisse, l’UDC occupe le devant de la scène avec son initiative pour l’autodétermination, s’opposant une nouvelle fois au reste de la classe politique. Cette fois-ci, la situation semble cependant différente; le contexte a évolué. Pourquoi les opposants à l’initiative font-ils fausse route et que peut-on apprendre de l’UDC dans cette campagne ? Tour d’horizon.

L’UDC s’est illustrée par sa campagne d’affichage : des visages apaisés, juste accompagnés d’une couleur sobre. Aucune formule tonitruante, aucun logo, rien. On y voit un simple « OUI ». On constate immanquablement une volonté de contraste avec les campagnes précédentes et leur ton criard, poussant à la controverse. Toutefois, il est intéressant de rappeler que l’UDC avait usé d’une stratégie semblable lors de la votation du 9 février. Sur ces affiches, aucun ennemi n’est identifié, il ne s’agit pas d’attaquer quelqu’un, mais de défendre la Constitution et la Patrie.

Cependant, ne soyons pas trop optimistes. Les méthodes habituelles rejetées par les initiants ont trouvé refuge auprès d’autres formations politiques. Sur l’affiche du PS, Trump, Poutine et Erdogan se détachent sur un fond rouge et noir, le regard froid et menaçant. La dimension provocante et malsaine de cette affiche de mauvais goût évoque involontairement d’autres campagnes, dites scandaleuses, utilisant curieusement les mêmes couleurs. L’image a une résonance ambiguë quant au message exact devant être transmis, mais qu’importe, on fait comprendre que l’initiative oppose le bien face au mal. Visiblement, la gauche se prend au jeu du populisme. Virus commun.

Poursuivons avec un plaidoyer de Roger Nordmann, conseiller national vaudois (PS), qui écrit sur son blog: «si l’initiative devait être acceptée, une véritable explosion toucherait la Confédération, avec à terme des dégâts multiples dans différents secteurs. Les fragments de la bombe atteindraient de manière durable les traités internationaux, […] ces obstacles que l’UDC entend nettoyer pour mieux imposer une société brutale, régie par la loi du plus fort.»

On notera le sens de la nuance. On distingue peu d’arguments autres que ceux contribuant à alimenter un alarmisme sournois – apparemment le dernier ressort pour lutter contre une initiative ne manquant pourtant guère de faiblesses. Le texte de Roger Nordmann – que nous n’avons jugé nécessaire de reproduire ici – se poursuit avec une litanie d’arguments ad hominem d’un registre similaire. La rhétorique douteuse de ce passage s’apparente aux techniques de la droite, qualifiées bien souvent de «populistes». Mais ce n’est pas seulement la forme qui souffre. La forme souffre parce que le fond agonise.

La menace des dangers économiques qui seraient liés à une potentielle acceptation de l’initiative représente, elle aussi, une corde sensible qui pourrait s’avérer contre-productive. Cet argument présenté par le centre droit rappelle le débat sur l’immigration de masse de 2014. L’argument de l’importance économique de la libre circulation des personnes n’avait alors guère convaincu la majorité des votants, et les perdants blâmèrent les milieux économiques et leur déconnexion de la population une fois l‘initiative acceptée. Quelques années plus tard, le même argument semble tomber sur un terrain tout aussi stérile qu’en 2014. Les libéraux-radicaux se laissent réduire à leur image de parti de l’argent, tandis qu’en face, l’UDC propose une vision, un mythe – voire peut-être une illusion?

Par ailleurs, les opposants se font rattraper par leurs errances passées. La «mise en œuvre» de l’article constitutionnel sur l’immigration de masse par le parlement fut hautement discutable. Il est facile de dénoncer ici un non-respect flagrant de la Constitution qui contribua à décrédibiliser ceux qui devraient aujourd’hui défendre notre démocratie. Le conseiller fédéral Ignazio Cassis répétait la semaine dernière la conformité démocratique de cette mise en œuvre dans le journal Le Temps, du fait qu’il n’y avait pas eu de référendum. Il semble cependant se tromper sur le rôle du parlement, celui de protéger la Constitution. La banalisation de cet acte contre la volonté du peuple cède un argument à l’UDC, qui s’érige en garant de la Démocratie, là où les autres ont failli.

Ce qui s’avère regrettable, c’est bien la faiblesse des opposants face aux sophistes, semblant dominer une bataille des idées qui ne fait que commencer. Les autres partis ne doivent pas rester des administrateurs construisant des majorités – parfois à tout prix. Il ne suffit pas de se reposer sur ses anciens lauriers. Cette initiative sera seule avortée si ses adversaires font eux-mêmes preuve d’initiative. L’esprit progressif cherche outre, cherche l’idée, cherche la solution qui mène à la victoire. Jusqu’à présent, l’arbitrage peut avoir suffi, mais demain, il ne suffira plus. Portons nos regards vers le futur, cherchons le mythe d’avenir!

Un article écrit en collaboration avec Manuel Constam

Ecrire à l’auteur:  jeremie.bongiovanni@gmail.com

Crédit photo: Parti Socialiste suisse

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