Vous êtes sur smartphone ?

Téléchargez l'application Le Regard Libre depuis le PlayStore ou l'AppStore et bénéficiez de notre application sur votre smartphone ou tablette.

Télécharger →
Non merci
Accueil » Céline Zufferey sur la trace d’une pionnière oubliée
Littérature

Rencontre

Céline Zufferey sur la trace d’une pionnière oubliée4 minutes de lecture

par Sandrine Rovere
0 commentaire
Zufferey

Elle avait fait sensation en publiant son premier roman chez Gallimard à seulement 25 ans. Rencontre avec la Valaisanne Céline Zufferey qui a publié ce printemps son deuxième opus, toujours à Paris.

Chez elle, la valeur n’a pas attendu le nombre des années. A 32 ans, la Valaisanne Céline Zufferey a publié ce printemps Nitrate, son deuxième roman. Ce livre propose une plongée dans les premiers temps de l’histoire du cinéma. Comme pour son premier ouvrage Sauver les meubles en 2017, Nitrate a paru dans la prestigieuse «Collection Blanche» de Gallimard, aux côtés de monstres de la littérature française, dont des prix Nobel tels Clézio ou Modiano.

Nous rencontrons l’artiste dans la cuisine de la maison familiale de Granges, près de Sierre. Désormais installée à Lyon, l’écrivaine profite d’une visite en Suisse à l’occasion du Festival international de littérature de Loèche-les-Bains pour voir ses parents. Et si la rencontre avec une journaliste empiète sur ce moment intimiste, elle ne semble pas se formaliser pour autant.

Il faut dire que Céline Zufferey aime parler de ses livres. «On est très seuls dans l’écriture. Et donc on a envie de partager notre travail avec d’autres et cela se fait au moment de la sortie», explique-t-elle en sirotant sa tasse de thé. Le plaisir de rencontrer les lecteurs se fait d’autant plus grand que plusieurs années se sont écoulées depuis la sortie de Sauver les meubles.«Pour moi, chaque roman est le dernier. Quand je termine la rédaction d’un roman, je ne sais jamais si je vais réussir à en écrire un autre», note Céline Zufferey. «Il m’a fallu du temps pour trouver un sujet qui me tienne à cœur et dont j’aie l’impression qu’il valait la peine d’être dit».

Une pionnière oubliée

Ce sujet qui valait la peine d’être dit, c’est la vie de la première réalisatrice de l’histoire du cinéma, Alice Guy. Une femme qui a tout fait à son époque: elle a réalisé des centaines de films, été directrice chez Gaumont, fondé sa société de production aux Etats-Unis… avant de tout perdre. Elle passera des années à tenter de retrouver ses œuvres, sans grand succès. Puis sombrera presque complètement dans l’oubli. «C’était une pionnière et les pionniers sont souvent oubliés parce qu’ils ont commencé trop tôt et se sont arrêtés trop tôt aussi», déplore Céline Zufferey. L’auteure a choisi son titre en référence au nitrate de cellulose qui composait les premières pellicules pour le cinéma.

A l’instar de son personnage de Constance, l’auteure s’est passionnée pour Alice Guy, au point de lui consacrer un an de recherches, entre rencontres avec historiens et collectionneurs et visites dans des réserves de films comme celles du CNC, le Centre national français du cinéma et de l’image animée. «Quand on est écrivain, on a une espèce de carte blanche. On peut aller vers des gens et leur dire: “Je m’intéresse à ce que vous faites, est-ce que vous pouvez m’en parler?” En termes d’inspiration, c’était vraiment très riche.»

Le résultat de ce travail, c’est une chasse au trésor à la recherche d’un film manquant d’Alice Guy. Mais comme dans un roman policier, l’intérêt de ce livre ne réside pas vraiment dans l’issue de cette enquête. «Quand j’ai clos cette année de recherche sur l’histoire du cinéma et sur Alice Guy, je me suis dit que la recherche en soi suffisait. Tout ce que j’avais fait donnait déjà assez de matière pour ce roman», explique l’auteure.

Ecrire en toute liberté

La trentenaire se réjouit d’avoir pu profiter, de la part de son éditeur, d’un espace de liberté très grand. Gallimard ne lui a jamais fait sentir l’urgence de publier ce deuxième livre. Elle affirme ne jamais avoir souffert non plus d’une pression personnelle de produire une suite à un premier roman remarqué. «J’avais montré que j’étais capable d’écrire un roman. Je m’étais montré à moi-même que j’étais capable d’aller jusqu’au bout. J’étais éditée. Ce qu’il restait, c’était de continuer à écrire». 

Ecrire, oui, mais sans recette toute faite. Car Céline Zufferey éclate de rire quand on lui demande comment s’explique sa réussite précoce. Diplômée de l’Institut littéraire suisse à Bienne, la Valaisanne estime surtout avoir eu la chance de rencontrer les bonnes personnes au bon moment grâce à ses études. Elle souligne également la nécessité de rebondir face aux échecs. «Il faut avancer et se dire que ce n’est pas la fin du monde et qu’on trouvera une autre route», estime-t-elle. 

Ce deuxième roman en poche, Céline Zufferey avoue ne pas avoir encore songé à l’avenir et à ce qu’il lui réserve. «Ecrire, c’est un peu se jeter dans un trou sans fond. Le saut n’est pas très rassurant. Pour l’instant, je me tiens encore sur le bord et je me demande si je vais sauter ou pas», conclut-elle avec un sourire.

Ecrire à l’auteure: sandrine.rovere@leregardlibre.com

Vous venez de lire un portrait en libre accès. Débats, analyses, actualités culturelles: abonnez-vous à notre média de réflexion pour nous soutenir et avoir accès à tous nos contenus!

Blanche
Nitrate

Editions Gallimard 
2023 
208 pages 

Vous aimerez aussi

Laisser un commentaire

Contact

Le Regard Libre
Case postale
2002 Neuchâtel 2

© 2024 – Tous droits réservés. Site internet développé par Novadev Sàrl