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Retrait de l’accord nucléaire iranien : retombées toxiques pour Trump3 minutes de lecture

par Le Regard Libre
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Les lundis de l’actualité – Baptiste Michellod

La France, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Union Européenne, la Russie, la Chine et l’Iran ont assisté avec consternation au retrait de Donald Trump de l’accord historique sur le nucléaire iranien, conclu sous Obama en 2015. Malgré les onze inspections de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique concluant que l’Iran respecte ses engagements en termes d’enrichissement d’uranium et de capacité de ses centrifugeuses, malgré les conseils de son Secrétaire d’Etat à la Défense James Mattis ainsi que l’avis d’Emmanuel Macron, Angela Merkel et Boris Johnson qui tous soutiennent que l’accord empêchait effectivement l’Iran de se doter de la bombe, le président Trump a tout de même décidé de se retirer du JCPOA (Joint Comprehensive Plan of Action).

Le gouvernement iranien s’est montré extrêmement résilient depuis sa naissance. Les sanctions relèvent pour l’Iran plus de la normalité que de l’exception. La conviction de Trump que le rétablissement des sanctions entraînera un changement de régime est vivement contredite par l’histoire du pays et l’analyse de nombre d’experts. Par conséquent, au lieu de tenter de justifier ou expliquer les causes insensées du retrait des Etats-Unis du JCPOA, nous allons plutôt en étudier les conséquences.

Le principal bénéficiaire de ce retrait, au-delà des Saoudiens et des Israéliens, n’est autre que le Corps des Gardiens de la Révolution. Cette institution, originellement créée par l’Ayatollah Khomeini afin de garantir les acquis de la Révolution Islamique de 1979, est devenue le bras armé des factions ultraconservatrices iraniennes. Les Gardiens de la Révolution, ou Pasdaran, ont acquis un rôle grandissant durant la présidence de Mahmoud Ahmadinejad (2005-2013), qui a accéléré leur essor politique et économique. Profitant d’une large opération de privatisation lancée en 2005, les Pasdaran ont racheté des milliers d’entreprises publiques. Il est estimé que ce groupe contrôle aujourd’hui au moins un tiers de l’économie iranienne. Ce sont ces mêmes Gardiens de la Révolution qui ont brutalement réprimé la manifestation pacifique du Mouvement Vert en 2009, qui contestait le vote ayant reconduit Ahmadinejad à la présidence. Ce sont eux également qui sont en charge du programme nucléaire et balistique iranien, fournissent des armes au Hezbollah et intervenant en Irak et en Syrie.

La victoire du modéré Rouhani aux élections présidentielles de 2013 a été un véritable camouflet pour les Pasdaran. Ses représentants politiques ont vivement critiqué l’accord sur le nucléaire conclu en 2015, en l’interprétant comme un acte de trahison vis-à-vis des idéaux révolutionnaires. Depuis, ils n’ont eu de cesse de remettre en cause la politique d’ouverture de Rouhani. Grâce au retrait de Donald Trump, un boulevard leur est ouvert pour délégitimer le bilan des modérés.

En réactivant son régime de sanctions, Trump va non seulement détériorer l’économie vacillante de l’Iran, mais aussi alimenter le discours anti-américain des factions conservatrices. Lors de son allocution du 8 mai, Trump a exprimé son soutien à la population iranienne. C’est pourtant la population iranienne qui paiera le prix fort lors du rétablissement des sanctions, et dont les aspirations de changement seront réprimées par les désormais omnipotents Gardiens de la Révolution.

En conclusion, rappelons-nous le discours de l’Etat de l’Union de Georges Bush de 2002, qui avait classé l’Iran comme un pays de l’Axe du Mal, alors que le président de la République Islamique d’alors était le plus progressiste de l’histoire du pays. Trois ans plus tard avait surgi le populiste et négationniste Ahmadinejad. Il ne nous reste plus qu’à espérer que l’histoire ne se répète pas, car qui sait quel extrémisme la rhétorique insolente de Trump pourra réveiller en Iran lors des prochaines élections ?

Ecrire à l’auteur : Baptiste.Michellod@etu.unige.ch

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