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«Le Menu»: un huis clos satirique aux petits oignons5 minutes de lecture

par Leïla Favre
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Le Menu © 20th Century Studios All Rights Reserved

Mark Mylod se risque au thriller à tendance horrifique en offrant une expérience filmique emplie d’humour noir et de tension. Une satire qui remet en cause une certaine vision capitaliste de l’industrie de la gastronomie avec, au Menu, un premier rôle prodigieux.

Le temps d’une nuit, Margot (Anya Taylor Joy) et Taylor (Nicholas Hoult) vont vivre une démonstration culinaire hors du commun sur l’île du célèbre et énigmatique chef  Slowik (Ralph Fiennes). Arrivé dans le restaurant, le couple naissant, accompagné d’une poignée de convives fortunés et hétéroclites, est loin d’imaginer la tournure que prendra leur soirée.

L’étau se resserre

Etablir son intrigue dans l’unique salle d’un restaurant est un coup de génie. Au-delà d’accroître le sentiment d’angoisse grandissant au fil du récit, la gestion de l’espace se focalise sur chaque groupe, table par table, nous donnant l’impression de visionner un véritable film à sketches. Grâce à la concentration effectuée sur les voix et la circulation de la caméra entre les tablées, Le Menu présente des fragments de vies d’invités vicieux. On regrette d’ailleurs une définition des personnages peut-être trop stéréotypée qui, certes, sert le discours de l’embourgeoisement de l’art culinaire mais demeure très fatiguée.

Si le traitement de l’espace par Mylod est remarquable, celui du temps la surpasse. Alors qu’aux prémices du récit notre appétit de mouvement et de tension est inassouvi, le film s’empare définitivement de nous lors de la présentation du quatrième plat, véritable tournant. Les plans et les mouvements reflètent la détresse de Margot et la découverte croissante de la monstruosité du chef cuisinier. Ce montage, oscillant entre brutalité et transparence, ainsi que le traitement des sons – comme les claquements de mains secs et agaçants du chef – traduisent successivement l’incompréhension, l’irritation et enfin l’angoisse que le public ressent au même titre que la clientèle.

© 20th Century Studios All Rights Reserved

Les clins d’œil à d’autres genres cinématographiques sont tout de même accueillis avec réserve. La tentative de fuite de Margot, empreinte d’une ambiance de survival, principal point faible du long-métrage, freine considérablement l’intrigue. Or, le soin apporté à la scène de l’exposition des personnages et l’attente des invités devant le mystère suscité par le maître des lieux rappelle le film d’enquête et attise la curiosité des spectateurs.

Lorsque le public s’en mêle

L’un des atouts de Le Menu réside dans sa capacité à inclure son public dans l’expérience éprouvée par les convives du chef Slowik et sa brigade. Le film se constitue de dix chapitres, du hors-d’œuvre au dessert, qui ponctuent l’intrigue. Ces entrées en matière s’accompagnent d’intertitres et de plans de détail sur le plat qui exposent la recette. Ces gros plans, se rapprochant du cadrage d’une émission TV, brisent le quatrième mur de manière originale et laissent la possibilité au public de se délecter visuellement de la cuisine de Slowik. D’ailleurs, lorsque ce dernier explique l’origine de ses œuvres, Ralph Fiennes est plutôt placé au centre de l’image.

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Il serait impossible de parler du Menu sans évoquer la performance de Fiennes. Seul ou entouré des autres protagonistes, ses expressions, son ton et sa diction (sans doute hérités de sa longue carrière sur les planches) retiennent toute l’attention. La révélation de sa folie, née de sa frustration face à l’hypocrisie de l’industrie de la restauration, est brillamment interprétée.

Mark Mylod et ses scénaristes proposent un discours sur notre propension à consommer à outrance. Cette critique se révèle rapidement et ne se distingue pas vraiment des précédents films sur le consumérisme. Une seconde lecture, survenant dans la dernière partie de l’intrigue mais pas moins explicite, évoque un retour à la simplicité et à l’essence-même des choses. Une résolution qu’il n’est finalement pas déconseillé de suivre.

Ecrire à l’auteure: leila.favre@leregardlibre.com

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Illustration de couverture: Le Menu © 20th Century Studios All Rights Reserved

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