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«Perfect Sense»: coup de foudre à Manhattan au temps de la pandémie3 minutes de lecture

par Fanny Agostino
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Les mercredis du cinéma – Edition spéciale: La coronarétrospective du cinéma d’anticipation Fanny Agostino

Dans la catégorie des associations déconcertantes, le film de David Mackenzie rassemble la comédie romantique et le film d’anticipation. En faisant fi du rocambolesque et de la traditionnelle quête du héros, Perfect Sense convoque brillamment la pulsion de vie et la persévérance des gens ordinaires.  

Pour les non-initiés, l’écueil des longs-métrages ayant pour thème l’effondrement de l’espèce humaine est parfois éprouvant. On l’admet, un peu par préjugés: zombies baveux et titubants, héros désemparé tentant d’échapper à la contamination pour redonner sens à une vie médiocre, images à l’hémoglobine saisissante et plans sensationnalistes. A cela, il faut ajouter les passages obligés du thème de la survie et du pompeux dénouement dégoulinant de moralité abjecte. Au point culminant de cette énumération, je veux bien l’admettre clairement: je ne suis pas une fétichiste de l’apocalypse au cinéma… Pourtant, Perfect Sense est parvenu à me réconcilier avec la désintégration de l’humanité.

Aux antipodes des attentes du genre

La plupart du temps, les films d’anticipation traitant de la fin du monde ont tendance à l’occulter: derrière les effets spéciaux et les mouvements de foule, la pierre angulaire de leur sujet est le drame humain. Celui-ci ne peut se résoudre à une vision extérieure et globalisée du phénomène, ou même celui de la famille nucléaire pour la simple raison qu’elle affecte les comportements et les émotions. Angoisses existentielles, disparition progressive de motivation, frustrations… Etre au plus près des conséquences d’une pandémie, c’est donner à voir le quotidien du badaud qui ne réalise pas d’exploit et qui subit l’impensable.

Cette mise en perspective nécessite donc une certaine révélation de l’intériorité d’un personnage. Perfect Sense le réussit doublement à travers la romance de Michael et Susan – campés par les excellents Ewan McGregor et Eva Green – naissant juste avant l’arrivée d’un virus dont on ne connaît ni l’origine, ni les modalités d’incubation. A travers ces deux individus, le spectateur suit l’évolution à échelle humaine de l’extinction progressive du monde.

La perte des sens, artefact de l’extinction humaine

Bien qu’inédits par son importance dans notre histoire, le récit à hauteur d’homme et l’intrigue amoureuse ne suffiraient pas à élaborer un scénario palpitant. Ce qui rend la fiction d’autant plus séduisante réside dans la nature de la maladie. Il ne s’agit pas de cracher du sang ou de mourir asphyxié après d’atroces souffrances. De manière progressive et imprévisible, les infectés perdent leurs sens.

Centraux dans l’interprétation et la perception du monde, leurs disparitions encourage l’être humain dans une course à l’adaptation. Le restaurant dans lequel travaille Michael – l’idée du pastiche de la comédie mielleuse Le goût de la vie est brillante – réinvente sa carte. Les aliments deviennent épicés et les clients se réunissent désormais à table non pour savourer des plats mais pour se retrouver et passer un moment convivial. La société s’adapte et poursuit son combat face à la dégénérescence inéluctable… Jusqu’à quand ?

Bénéficiant d’une esthétique glacée avec ses tons monochromatiques, Perfect Sense baigne dans une ambiance glaciale où pèse la menace de l’extinction du genre humain. Un fardeau et une angoisse constante – redoublée par une bande originale laissant la main mise aux instruments à cordes – que seule la volonté et la conviction en l’humanité permettent de contrer. Les quelques choix de facilités pour figurer les symptômes du virus n’estompent pas la réjouissance que l’on peut ressentir au visionnement de cette tragédie, si proche et si différente de notre actualité.

Ecrire à l’auteur: fanny.agostino@leregardlibre.com

Crédit photo: © IFC Films

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