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Films

Critique

Emir Kusturica nous emmène sur sa voie lactée avec Monica Bellucci2 minutes de lecture

par Jonas Follonier
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Emir Kusturica, «On the Milky Road»

«D’après trois histoires vraies et une imagination débordante»: ainsi commence On the Milky Road. Dans une Yougoslavie en plein conflit, un petit coin de paysannerie apparaît à l’écran. Des oies, rappelant celles du Capitole qui – selon l’historien latin Tite-Live – prédirent une invasion gauloise, se baignent dans le sang d’un porc que l’on vient de tuer. Un incipit à l’image de tout le long métrage: du tragique et du comique barbouillant dans le même récipient au son de la langue serbe.

Les couleurs, ce sont aussi elles que l’on remarque aussitôt: bien avant le laitier Kosta (interprété par le réalisateur lui-même, Emir Kusturica) et sa sœur Milena (Sloboda Micalovic), c’est le décor qui est le premier personnage du film. Des paysages à couper le souffle, un soleil qu’on dirait divin, des animaux omniprésents. Cet univers est aussi fantasque. Une poule qui sautille devant un miroir, des oiseaux qui dansent, une horloge qui «mord» tous ceux qui veulent la réparer: on comprend que le cinéma de Kusutrica puisse diviser.

Au milieu de cette agitation tranquille, de cette paix d’en temps de guerre, Kosta est un homme qu’on croit fou, traînant sur son âne et sous son parapluie, slalomant entre les balles. Il est avant tout un laitier qui a connu beaucoup de malheurs, et qui continue sa tâche, rien que sa tâche, malgré la guerre qui l’entoure. Mais c’est sans compter l’arrivée au village de la magnifique Nevesta (Monica Bellucci), destinée à marier le frère de Milena. La célèbre actrice témoigne d’un bouleversant travail, déjà rien que pour la langue et les trois ans de tournage.

Naturellement, Kosta et Nevesta vont tomber amoureux l’un de l’autre. Un peu trop rapidement pour que cela paraisse réaliste. Mais réaliste, le film ne veut pas l’être. En témoigne sa seconde partie, faisant frôler ce drame serbe au genre du merveilleux. Contraints de fuir ensemble les soldats après l’atroce tuerie que furent les noces, le couple miraculeusement en vie entend survivre plus miraculeusement encore. Cachette dans le creux d’un arbre immense, plongée sous l’eau, montée vers les nues, cette nouvelle création d’Emir Kusturica fait la part belle à l’amour, et à l’Italienne que nous admirons tous.

Comme le prouve le contexte du premier baiser des deux amants, On the Milky Road est un feu d’artifice. Absolument tragique, absolument comique, le film célèbre la poésie populaire. Celle de la vie contre la guerre. Le spectateur, tel le rapace survolant son ami Kosta, assiste à un grand film basé sur une musique exceptionnelle signée Stribor Kusturica, le fils du réalisateur. Un monde où les différents fluides se confondent dans un flot de fous rires et de frissons. L’eau, le lait, le sang, les larmes. Cette vie qui fait face au feu. Telle la vipère qui plusieurs fois dans le film se baigne dans le lait maternel, le mal semble demander pardon de faire partie du monde.

Et pourtant, il semble difficile de qualifier ce long métrage de chef-d’œuvre, pour une raison qui au moins échappera aux plus débutants d’entre nous: Kusturica se répète trop depuis quelques années. Il s’enferme, et son public ne le lui en fait pas grâce. Ainsi, la bonne critique qui se termine ici aura eu l’audace de se confronter aux sévères «une étoile sur cinq» de Télérama et du Monde.

Ecrire à l’auteur: jonas.follonier@leregardlibre.com

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